Pierre Mabille, depuis 1997, a choisi un motif unique, une forme qu’il répète à loisir et que l’on identifie comme étant sienne. Il n’est pas le premier artiste à s’être imposé la contrainte d’une forme unique, Josef Albers avait fait de même dans la série Hommage au carré.
S’imposer une contrainte permet de se concentrer sur l’essence de la peinture. D’une contrainte qu’il qualifie de douce et qui est un moteur de travail et non un protocole, il tire le plus haut potentiel des couleurs qu’il utilise avec maestria étant un fin coloriste à l’instar du même Albers mais aussi de Matisse ou d’Herbin. De fait, il ne se passe jamais la même chose dans un tableau de Pierre Mabille, les rythmes, l’équilibre, les nuances, les valeurs, les tons, les compositions entrainent le spectateur dans un monde très riche.
Dans un domaine, l’art abstrait, où l’usure est à craindre, une série récente, commencée en 2022, montre que l’artiste sait se réinventer. Il dispose les formes - qui étaient jusque-là toujours à l’horizontale - de manière verticale, oblique, etc., ce qui fait apparaître d’autres formes. Il compacte, superpose et cette action engendre une abondance de contre-formes et de nouvelles formes dans on verra bien, who knows ou d’une autre manière dans entre 2 belles, love song. Dans cette série, tous les tableaux font la même dimension : 40 x 50 cm et Pierre Mabille trouve que c’est un grand format si on le compare aux miniatures médiévales, oui l’artiste est facétieux. En dépit de leur unicité, ces tableaux se conçoivent également comme polyptyque. L’accrochage en polyptyque permet aux œuvres d’interagir les unes avec les autres dans un espace plastique augmenté où les formes et couleurs, en plus de dialoguer entres elles dans le cadre traditionnel du tableau, entament de nouvelles relations. Elles se répondent, se mangent d’une toile à l’autre et les combinaisons sont infinies et…