À quelques mois des élections américaines, le musée Maillol consacre une rétrospective à Andres Serrano anglée sur la société américaine. Photographe d’origine hondurienne né à New York en 1950, l’Américain a fait du portrait – même lorsqu’il photographie des objets – son domaine de prédilection depuis les années 1980. Série après série, il met ce genre au service d’un discours politique examinant les travers du monde contemporain, et plus particulièrement ceux de son pays natal. Parfois dérangeante et provocante, l’œuvre de Serrano a souvent défrayé la chronique, notamment son célèbre Christ immergé dans du sang et de l’urine (« Immersions »,1987-1990) et ses images montrant des cadavres (série « La Morgue », 1992). Autant son travail est percutant, autant le photographe est mesuré dans ses paroles, laissant à chacun le soin d’interpréter librement ses images. Il n’empêche : Andres Serrano appuie là où cela fait mal, misant sur une hyperesthétisation, même pour des sujets graves. Comme lorsqu’il aborde la passion des Américains pour les armes à feu. Dans cette série intitulée « Objets de désir » (1992), il a recours à des gros plans sur les canons saisis frontalement et visant littéralement celui qui regarde l’image. Andres Serrano a aussi senti l’air du temps quand, en 2004, il photographie Donald Trump dans le cadre de son émouvant travail « America » conçu après les événements du 11 septembre 2001. L’objectif de cette série était de souligner la diversité de la population américaine au travers de centaines de portraits de ses compatriotes dans leurs tenues ethniques, religieuses ou professionnelles, comme les pompiers, héros de ce jour sombre. Toutes ces images, et bien d’autres, traitant notamment du racisme, sont à retrouver dans le parcours de l’exposition qui présente également ses toutes dernières créations, inédites : des tirages photographiques peints à la main.
« Andres Serrano. Portraits de l’Amérique », Musée Maillol, Paris, 75007, jusqu’au 13 octobre 2024.
museemaillol.com