Tandis que les artistes font entendre leur voix dans un milieu culturel déchiré par le conflit israélo-palestinien, les institutions sont prises à partie et certaines adoptent des positions de plus en plus marquées. Le 11 novembre, dans la rotonde du Guggenheim Museum de New York étaient déroulées des bannières montrant des images de parents pleurant leurs enfants morts à Gaza, provoquant la fermeture temporaire du musée. Au même moment, une dizaine d'artistes et réalisateurs se retiraient de l'International Documentary Festival Amsterdam (IDFA), le plus important festival de film documentaire au monde, en raison de la censure d'une manifestation pro-palestinienne. Le 13 novembre, la documenta de Kassel annonçait sur son site la démission de deux membres (sur six) de son comité de recherche pour sa 16e édition, en 2027. L'artiste et théoricienne israélienne Bracha Lichtenberg Ettinger affirme que l'organisation a refusé son souhait de repousser les séances de travail, afin de « permettre au chagrin et à la souffrance de s'exprimer » suite aux attaques terroristes du Hamas en Israël, le 7 octobre. De son côté, le critique d'art et curateur indien Ranjit Hoskote a dû se dédouaner d'accointances avec le mouvement BDS (appelant au boycott d'Israël) et d'accusations d'antisémitisme liées à une pétition critiquant le sionisme d'extrême-droite, signée en 2019. Signifiant ses liens personnels avec la communauté juive, il appelle au « besoin impérieux de rapprocher les communautés d’Israël et de Palestine, à renoncer au caractère d'exception de la souffrance de chaque côté et à créer une solidarité de deuil, une communion de vulnérabilité partagée et un processus de guérison et de renouveau ». Le 16 novembre dans la soirée, on apprenait que c'était tout le comité (soit ses quatre autres membres Simon Njami, Gong Yan, Kathrin Rhomberg et María Inés Rodríguez) qui démissionnait, mettant en danger la survie de l'événement lui-même. À Venise, la biennale 2024 a annoncé cette semaine la tenue, parmi ses 30 « événements collatéraux », d'une exposition organisée par le collectif activiste palestinien Artists + Allies x Hebron, co-fondé par l'artiste sud-africain Adam Broomberg et le militant palestinien Issa Amro, qui présentera une série de photographies, « Anchor in the Landscape », consacrée aux oliviers millénaires de Palestine menacés par l'occupation israélienne. Quelques jours plus tôt, on apprenait que le projet du Palestine Museum U.S. – présent à la biennale en 2022 – était rejeté par les organisateurs. Pendant ce temps en France, plusieurs figures de la culture (parmi lesquelles Isabelle Adjani, Pierre Richard ou Leïla Slimani) ont appelé à une manifestation silencieuse, le 19 novembre, entre l’Institut du monde arabe et le musée d’art et d’histoire du judaïsme, qui « s’ouvrira avec une seule longue banderole blanche » sans revendication politique, ni slogan.