Quand on demande à Joana Hadjithomas si les artistes arabes ont bénéficié ces dernières années de davantage de visibilité sur la scène internationale, celle-ci hésite à trancher. La cinéaste et plasticienne libanaise a fondé au lendemain de la catastrophe du port de Beyrouth en 2020 la plateforme Correspondaences, avec Khalil Joreige, Sandra Terdjman, Tarek Atoui et Sandra Dagher, pour renforcer les liens entre son pays d’origine et la France où elle vit. Elle estime important de nuancer : « La situation s’améliore, même si la “scène artistique arabe“ est multiple et complexe à appréhender de même que ses liens avec l’international ».
Malgré tout, les nouvelles technologies et les réseaux sociaux portent la voix d’artistes de pays émergents, éloignés jusque-là des centres culturels européens ou américains. « L’intérêt va croissant pour l'art non occidental et non blanc », constate également le Libanais Alaa Itani, lauréat l’année passée du prix de la Fondation Boghossian (Bruxelles) avec sa série « La plasticité des hammams », qui se moque du vieux prisme orientaliste.
À son image, une nouvelle génération d’artistes arabes creuse ainsi son chemin, portée par la réussite internationale de figures comme le Franco-libanais Ali Cherri, Lion d’argent à la dernière biennale de Venise, le Saoudien Muhannad Shono ou sa compatriote Manal Aldowayan, entrés dans les collections du Centre Pompidou, voire du Dubaïote Mohammed Kazem, présenté à la dernière biennale de Lyon.
Un écosystème local en constitution
Cette reconnaissance ne doit rien au hasard. Elle est liée à l’émergence depuis une quinzaine d’années d’un écosystème régional, spécialement aux Émirats arabes unis (EAU), plus récemment en Arabie saoudite, deux pays qui ambitionnent de devenir des…