Le Quotidien de l'Art

Le Gulf Futurism, préfiguration d'un monde à venir

Le Gulf Futurism, préfiguration d'un monde à venir
L’exposition « Arabofuturs » à l’Institut du Monde Arabe à Paris jusqu’au 27 octobre.
DR.

« Gulf Futurism » : ce concept récent recouvre aussi bien l’idéologie de développement hypermoderniste caractéristique des pays du Golfe persique que les pratiques artistiques qui en questionnent les effets. Ce « futurisme » déjà à l’œuvre préfigure-t-il ce qui pourrait advenir dans le reste du monde ? Analyse, à l'occasion de l’exposition « Arabofuturs », jusqu’au 27 octobre à l’Institut du monde arabe à Paris. 

Dans une boucle sans fin, des passerelles automatisées ne menant nulle part traversent d’immenses centres commerciaux et de luxueux lobbies d’hôtels. Ici et là se profilent des silhouettes spectrales. Esseulées, parfois floutées, elles semblent s’être égarées, enfermées dans un dédale d’artifices, et comme vouées à un étrange culte consumériste. Réalisée par l'artiste et écrivaine américano-qatari Sophia Al Maria, l'installation vidéo au titre ironique de Black Friday (2016) a été filmée à l’aide d’un drone, notamment dans l’iconique hôtel Sheraton de Doha, au Qatar, conçu par l’architecte américain William Pereira. L'œuvre aux accents dystopiques est à voir actuellement à Paris dans l’exposition collective « Arabofuturs. Science-fiction et nouveaux imaginaires », à l’Institut du monde arabe (IMA). 

L’univers sombre de Black Friday est emblématique du Gulf Futurism (futurisme du Golfe), qui malgré sa référence au mouvement d'avant-garde, n’est pas à proprement parler un mouvement artistique. Le concept a d'abord été théorisé par Sophia Al Maria en 2008 dans son blog The Gaze of Sci-Fi Wahabi, avant d'être développé en collaboration avec la Koweïtienne Fatima Al Qadiri, artiste et compositrice de musique électronique. En 2012, les deux femmes publient sur le site Dazed un texte associé à une série de photomontages – une sélection en est présentée à l'IMA. Dans une esthétique low-fi rétrofuturiste, les artistes se mettent en scène dans des centres commerciaux et des espaces génériques évidés. En particulier dans la série « The desert of the unreal », clin d’œil au « désert du réel » de Jean Baudrillard et aux notions d’« hyperréalité » et de « dissolution du réel ». 

Un futurisme en actes 

Le Gulf Futurism se caractérise par un « futur qui est déjà là » – notion empruntée à l'auteur de science-fiction William Gibson. Un avenir déjà réalisé, qui se réactualise en permanence, tel un programme informatique qui s’update, et qui aurait été implémenté dès les années 1970 à l’échelle du microcosme que sont les pays du Golfe. Dans un contexte de boom pétrolier et d’afflux de pétrodollars dans la région, d’ultra-capitalisme et d’hypercroissance adossés à une idéologie hypermoderniste, ce futurisme en actes se caractérise par…

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Article issu de l'édition N°2885