Trois archanges se détachent à la manière d’un triptyque de cire. Recouverts de longues peaux de vache, ils se dressent avec douceur sur de hauts piédestaux de bois. Nos yeux sont à hauteur de leurs fines chevilles qui évoquent celles du Christ de Grünewald, si frêles, marquées de sérosités, surmontées de genoux dénudés qui se tordent dans l’effort. Celui de s’élancer ou d’atterrir, anges en ascension ou déchus, leurs silhouettes pudiquement tendues se parent de noblesse, le visage caché sous de lourds drapés de peaux dont le poids est peut-être celui d’un fardeau ou d’une protection. Ces figures à la mémoire christique sont nées entre les paumes de l’artiste flamande Berlinde de Bruyckere dans son grand atelier de Gand pendant le confinement, réalisées spécialement pour une exposition monographique (la principale en France après celles de la Maison rouge en 2005 et 2014), sur l’invitation de Numa Hambursin, directeur du MO.CO. Elle y met en scène un corpus d’œuvres dont la maîtrise technique et la puissance sont telles qu’on en oublie que ces corps de cire, de métal et de résine, sont des sculptures. Ils s’incarnent, dans leur fragilité et leurs stigmates, et nous communiquent le mystère du passage de la vie à la mort.
« Berlinde de Bruyckere, Piller ǀ Ekphrasis », du 18 juin au 2 octobre, MO.CO Montpellier
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