Il fut un temps où la Power List des 100 personnes les plus influentes du monde de l’art publiée depuis 2002 par le magazine ArtReview alignait les milliardaires créant leurs musées privés, les artistes bankable et les méga-galeristes. Les temps ont changé. Dans la nouvelle édition publiée le 3 décembre par ArtReview ne figure ni François Pinault, ni Bernard Arnault, encore moins Jeff Koons ou Damien Hirst. Le virage politique entrepris en 2019 s’accentue cette année. La première place ne revient pas à une personnalité mais à un mouvement, Black Lives Matter, qui détrône Felwine Sarr et Bénédicte Savoye, auteurs d’un rapport sur les restitutions des biens pillés en Afrique, désormais à la troisième place. Le collectif indonésien Ruangrupa, chargé de la prochaine édition de la Documenta de Cassel en 2022, décroche la médaille d’argent, tandis que le mouvement #MeToo arrive en quatrième position. Les personnalités africaines-américaines sont plus que jamais à l’honneur. Ainsi de l’historien Fred Moten (5e), l’artiste Arthur Jafa (6e), la directrice du Studio Museum de Harlem Thelma Golden (8e place), le puissant président de la Fondation Forbes, Darren Walker (11e), ou encore la collectionneuse Pamela J. Joyner (13e). Côté Français, la moisson se compose du trio du Centre Pompidou Serge Lasvignes, Bernard Blistène et Christine Macel à la 21e place, l’essayiste Paul B. Preciado (39), le philosophe Bruno Latour (47), le galeriste Emmanuel Perrotin (50) et le collectif de cinéastes Kourtrajmé (80). ArtReview justifie ainsi sa sélection partiale et partielle, réalisée par une vingtaine d'« insiders et outsiders » : « L’ouverture d’une méga-galerie à New York peut avoir peu d’effet sur la scène artistique à New Delhi. Une foire d'art palpitante à Shanghai peut ne pas concerner un artiste en difficulté à Londres. Tout comme l’histoire de l'art qu’on nous a enseignée à l'école peut s’avérer être un gruyère d’omissions. »