Un lieu chahuté par des machines s’offre au regard. Les gravats succèdent aux gravats, les décombres aux décombres. La caméra ne s’arrête jamais, elle accomplit d’interminables panoramiques, elle tourne en rond dans un cirque tellurique, peinant à s’approprier des lieux qui n’en finissent pas de gémir sous l’assaut des pelleteuses. Une voix de femme s’élève et décrit un site millénaire. Nous sommes sur les toits en chantier de la Samaritaine, mais nous sommes aussi sur les traces de la Samarie, terre biblique et périmètre de fouilles archéologiques où l’on met à jour tumulus et sépultures. « Derrière le coucher du soleil, de l’autre côté du fleuve, le pays dont tu vas prendre possession », profère une voix. Nous sommes dans un espace qui est un ici et un ailleurs, un proche et un lointain, nous sommes dans un temps qui est à la fois l’hier et l’aujourd’hui. Chaos des lieux, perturbations du temps, le film de Dmitri Makhomet connecte des mémoires perdues, en attendant que la Samaritaine se forge un nouveau destin.