Hélène Delprat est une funambule. Elle avance sur un fil où, d’un côté, se trouve l’histoire de l’art (Magritte, Courbet, Picasso...), et, de l’autre, une culture populaire, le cinéma, la littérature, la fête foraine, la BD... Son « territoire autonome » qu’est la peinture est un Voyage initiatique, où elle plonge dans une sorte de grotte préhistorique à la recherche des ombres de l’histoire de l’art, mais où elle partage aussi ses questionnements (Où est la peinture ?), ses doutes (Qu’est-c’que faire, j’sais pas quoi faire), ses échecs (Raté ou Encore raté), toujours avec humour et dérision, voire autodérision. Elle n’hésite pas à se représenter en « peintre méchant » ou avec un nez en forme de carotte, comme si elle était un bonhomme de neige, et elle va jusqu’à se mettre en scène dans une vidéo où elle est affublée d’oreilles d’âne ou à créer le trouble avec son double en silicone vêtu de sa culotte courte et de sa veste noire tranchant sur sa chemise blanche. S’il y a quelque chose de féérique dans ses peintures, c’est immédiatement contredit par une tonalité dramatique et grave avec des silhouettes inquiétantes, évoquant le fascisme et Le Dictateur de Chaplin. Le fil sur lequel Delprat avance est fait de morcellements pop, de créatures hybrides qui renvoient à un moment fondateur, lorsque, après ses études à l’École des beaux-arts de Paris, elle est pensionnaire à la Villa Médicis (entre 1982 et 1984) et où elle découvre Les Métamorphoses d’Ovide. Depuis, elle développe un monde hybride fait de transformations, où se croisent une femme panthère, un cerf chevalier armé d’un fusil (Actéon John Wayne) ou incarnant Ophélie, des blobs cartoonesques, des loups humains... Autant de pistes où elle se dévoile et nous échappe, comme si nous étions Apollon, et elle, Daphné.
« Hélène Delprat. Écoutez ! C’est l’éclipse », jusqu’au 15 juin
Fondation Maeght, 623, chemin des Gardettes, 06570 Saint-Paul-de-Vence
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