Le Quotidien de l'Art

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Lune de miel

Lune de miel

« Le soleil a rendez-vous avec la lune, mais la lune n'est pas là et le soleil attend... La lune est là, la lune est là ! » La chanson de Charles Trenet résonne face aux toiles d'Anna-Eva Bergman (1909-1987), dont les lumineuses lunes auront dû attendre quelques décennies avant d'être dûment éclairées. À une époque où l'art se conjuguait au masculin, l'œuvre de la peintre aura longtemps été dans l'ombre de celle de son époux Hans Hartung, qu'elle rejoint en France en 1952. Bien qu'elle ait fait carrière dans l'Hexagone, où le musée d'Art moderne de Paris lui a consacré au printemps 2023 sa première grande rétrospective, c'est dans son pays natal qu'elle a aujourd'hui le vent en poupe. Dans l'enceinte argentée du nouveau Nasjonalmuseet, l'exposition d'une cinquantaine de ses brillantes toiles a déjà attiré 120 000 visiteurs depuis son ouverture mi-juin, soit deux fois plus qu'à Paris. Inattendue, cette fréquentation montre combien le retour de la peintre sur ses terres d'origine était attendu. « Oslo est une petite ville, mais les visiteurs sont venus de partout en Norvège et à l'international. Ils restent longtemps face aux toiles méditatives, et beaucoup reviennent ensuite pour les revoir », se réjouit la curatrice Wenche Volle. L'exposition marque également la (re)découverte de l'important triptyque Composition. Commandé en 1951 par l'hôtel Farris Bad à Larvik, il avait perdu l'un de ses pendants, resté secrètement en mains privées pendant des décennies. À son apparition aux enchères en 2013, le Musée national l'acquiert et le fait restaurer, découvrant alors l'une des premières toiles de Bergman utilisant des feuilles de métal. De quelques touches à d'immenses aplats de brillance, l'exposition retrace sa trajectoire de talent en orbite à artiste star, et redore le blason d'une œuvre éclatante.

Article issu de l'édition N°2927