Ils ont été parmi les plus touchés par les conséquences des confinements à répétition : enfermés dans des espaces de vie souvent restreints, drastiquement isolés de leurs pairs à un âge où le contact social est déterminant, coupés de l’imagination vitale d’un futur à la fois personnel et commun… Dès les premiers mois de la pandémie de Covid, psychologues, professeurs et parents ont tiré la sonnette d’alarme sur l’état de santé mentale et physique des jeunes, dont l'accès facile à la technologie et aux réseaux sociaux cache parfois le besoin de rencontre physique avec le monde et les autres. Lorsque les musées ont rouvert en mai 2021, ce fut la première tranche d’âge à revenir. Ce grand retour – une arrivée pour beaucoup – a surpris les établissements. « Le besoin de lien social était énorme et le musée, gratuit pour les moins de 18 ans, s’y prêtait facilement, explique Virginie Donzeaud, administratrice générale adjointe du musée d’Orsay, où le taux de gratuité a alors atteint un record de 70 %. Une fois l’appétence des jeunes pour le lieu constatée, il ne tenait qu'à nous qu’ils s’y sentent bien. Le pari ne pouvait pas être simplement de satisfaire les visites post-Covid, mais aussi d’être à la hauteur de l’attente et de l’intérêt montrés. »
Comme d'autres, Orsay a mis en place de nouveaux programmes. À l’automne 2023, la première d’une série de soirées « GenZ'Art », qui mêlent spectacle vivant, musique et rencontres autour de thématiques (écologie, place des femmes, exode rural...), affichait complet. Animés par des artistes contemporains, ces événements sont l’occasion de « contextualiser les collections pour faire le lien entre le XIXe siècle, très éloigné pour les jeunes, et le XXIe, qui partagent les mêmes grands enjeux de société », poursuit Virginie Donzeaud. Ainsi, pour l’exposition Louis Janmot à l'automne dernier, l’auteur de manga Tony Valente fut invité à parler de la quête, dans son œuvre et dans celle du peintre, tandis que la jeune activiste écologiste Camille Étienne animait une agora participative et que le chorégraphe hip-hop Mourad Merzouki se livrait à des Impromptus au milieu des collections. « Même aux endroits les plus classiques, on cherche un regard détourné », souligne l'administratrice du musée d'Orsay, reprenant l’intitulé d’un autre cycle de rendez-vous dédié aux 12-16 ans, lancé en mars. Un dimanche par mois, le « Grand Détournement » invite les adolescents à revisiter les collections en faisant appel à leur propre imagination. Inventer la playlist d’un tableau, imaginer des dialogues entre les personnages d’une toile, repenser le titre d’une œuvre… « En parlant de leur quotidien, on jette des…