L'analyse de la postérité de Guy Debord dans le champ des arts plastiques se heurte à une première et rédhibitoire contradiction, si l'on considère que le projet situationniste vise son aboutissement dans la disparition totale de l'art (par l'abolissement des frontières avec la vie). L'exclusion des artistes du mouvement en 1962, puis la condamnation sévère des groupes artistiques « pro-situs » après mai 68, accusés de participer au devenir marchandise de la radicalité révolutionnaire, a fâché définitivement l'Internationale situationniste (IS) avec les arts plastiques. Mais l'impossible héritage n'exclue pas la référence, et le milieu de l'art s'en donne à coeur joie : Debord est sur toutes les lèvres, La société du spectacle est le livre de chevet des étudiants des écoles des beaux-arts. L'auteur lui-même faisait la sombre prophétie de cette récupération : « cette élite qui va s'y intéresser, la moitié ou un nombre qui s'en approche de très près, est composée de gens qui s'emploient à maintenir le système de domination spectaculaire ». Cette fétichisation cauchemardesque est un lieu commun que les…