Guy Debord détestait la société et la société l'adore, principalement pour cette raison. Quand, en 1994, le penseur et poète s'est tué d'une balle dans le coeur - son coeur misanthrope et amer, gros de l'échec de la révolution, malade de la bêtise humaine -, il s'est vu offrir des obsèques nationales. Alors que, selon ses théories, l'empire du capitalisme marchand qui modèle tout à son image, montre chaque jour les stigmates de son hégémonie, avant aliénation totale, la Bibliothèque nationale de France (BnF) consacre une exposition à l'auteur de la Société du spectacle. Conçue à partir du fonds d'archives de Debord, classé Trésor national et acquis en 2011 par l'institution, cette rétrospective soulève, au-delà du paradoxe de ce culte institutionnel, les ambiguïtés qui traversent l'oeuvre et l'engagement de Debord. Le titre de l'exposition, « Un art de la guerre », réfère au Jeu de la guerre inventé en 1956 et perfectionné jusque dans les années 1980. Le Kriegspiel inspiré des théories belliqueuses de Clausewitz aurait été destiné aux membres du situationnisme en guise d'entraînement. Mais, présenté…