Tandis que les manifestations pour un cessez-le-feu à Gaza se multiplient dans le monde entier, les musées sont de plus en plus mis au défi de se positionner contre le bombardement incessant de la population palestinienne par l'armée israélienne. En particulier aux États-Unis, au Canada et en Allemagne, où une partie de la population s'oppose au soutien inconditionnel au gouvernement de Benyamin Netanyahou. Le 10 février, l'atrium du MoMA de New York était envahi par 500 à 800 manifestants. Un tract imitant un guide de visite dénonçait la présence au conseil d'administration du musée de cinq trustees (Leon Black, Larry Fink, Paula Crown, Marie-Josée Kravis et Ronald S. Lauder), dont certains investissements sont liés à l'armement d'Israël et aux technologies de surveillance. Une longue bannière « MoMA Trustees Fund Genocide, Apartheid, and Settler Colonialism » fut déployée. Trois jours plus tard, une lettre ouverte signée par plus d'une centaine d'employés ou collaborateurs du MoMA dénonçait le silence de l'institution : « Nous sommes fermement convaincus que la crise actuelle doit être reconnue comme un génocide et traitée de toute urgence. » Le 12 février, à New York encore, 17 artistes juifs antisionistes interrompaient une conversation au Jewish Museum entre son directeur James S. Snyder et l'artiste Zoya Cherkassky, qui expose « 7 October 2023 », une série de toiles évoquant l'onde de choc des massacres du Hamas en Israël – sans faire mention de ceux commis par Israël à Gaza. Chacun leur tour, les activistes se levèrent pour dénoncer une « propagande impériale » servant à « fabriquer le consentement au génocide ». Ils furent brutalement expulsés par le service de sécurité et insultés par l'assistance et l'artiste. Au Hamburger Bahnhof de Berlin cette fois, le 10 février, la performance participative de l'artiste cubaine Tania Bruguera, consistant en la lecture ininterrompue par des dizaines de participants des Origines du totalitarisme de Hanna Arendt, a été interrompue à deux reprises. Une première fois, à l'invitation de l'artiste, pour déployer les mots « Palestine Will Set Us Free » dans le vaste hall, puis avec la prise de parole pacifique, non prévue cette fois, du groupe d'activistes antisionistes Thawra, qui dénonçait la participation de Mirjam Wenzel, directrice du Jüdisches Museum de Francfort et, selon eux, soutien d'Israël. La réaction de Tania Bruguera et des directeurs du musée, Sam Bardaouil et Till Fellrath (qui publièrent un communiqué évoquant de soi-disant « attaques » et « discours de haine ») fut elle-même assez violente. Le lendemain l'artiste se rétractait sur Instagram, affirmant : « La remise en question d'un projet est quelque chose que j'ai toujours apprécié dans mon travail. » Dernier événement en date, ce 14 février : 75 artistes et travailleurs de l'art ont envahi l'Art Gallery of Ontario, à Toronto, réclamant la libération de la Palestine et demandant « Où est Wanda ? », en référence au brutal départ, en novembre dernier, de la curatrice Wanda Nanibush, soutien de la cause palestinienne.