Nathalie Guiot
Éditrice, ancienne journaliste, issue d'une grande famille de la distribution française, Nathalie Guiot a longtemps acheté avec boulimie, sillonnant frénétiquement les foires. Jusqu'à ce qu'un jour elle décide de mettre la pédale douce : « Je me suis dit «calme-toi, pose-toi, décélère» ». Celle qui se dit inspirée par Gertrude Stein et Marie-Laure de Noailles ajoute : « J'envisage plus aujourd'hui l'accompagnement que la possession ». L'exposition « Muse Program » qu'elle organise chez elle avec le commissaire Emmanuel Lambion est significative d'un tournant. Au menu, 47 artistes invités à occuper les 800 m2 de la maison. Nathalie Guiot prépare aussi pour octobre un livre d'entretiens entre des artistes célèbres et leurs tout premiers collectionneurs, échange stimulant entre Pistoletto et Giuliana Setari, Doug Aitken et Patrizia Sandretto Re Rebaudengo. « Les Stein avaient acheté peu d'artistes, mais sur la durée. Aujourd'hui, on picore, moi la première. J'ai déjà réduit mon champs d'intervention. Je suis les artistes de façon plus approfondie ». Elle a enfin lancé depuis l'an dernier la plateforme de performances « Experienz » (lire page 6), dont la deuxième édition se tient au Wiels, à Bruxelles. « Être juste collectionneur, ce n'est pas actif, estime-t-elle. J'aime être dans le faire. Ce qui reste, c'est ce que l'on a produit ».
Myriam et Amaury de Solages
Si vous aviez dit en 2010 à Amaury et Myriam de Solages qu'ils sortiraient de leur réserve naturelle, ils ne vous auraient sans doute pas cru. Pourtant, depuis avril 2011, ces collectionneurs français établis à Bruxelles se sont prêtés au jeu du dévoilement en ouvrant la Maison particulière, un lieu convivial où ils invitent collectionneurs, artistes et même galeristes à exposer leurs choix autour d'une thématique, cette fois-ci sous le libellé « Voyages intérieurs ». La création de cet espace ne les empêche pas d'acheter goulûment. À l'exclusive, ils préfèrent l'éclectisme gourmand, achetant aussi bien des grands noms tels qu'Anish Kapoor ou Tony Cragg, que d'autres plus confidentiels. Ce avec une constante : « Éviter le joli ». « On cherche l'excitation de choses qui nous bouleversent », explique le couple. Une excitation qu'ils peuvent trouver aussi bien dans l'art contemporain que dans un monolithe du Niger.
Marie Taittinger
C'est presque depuis leur installation voilà onze ans à Bruxelles que Marie et Hugues Taittinger ont commencé à acheter de l'art contemporain. Le premier achat ? Un diptyque de Massimo Vitali. Le reste, une suite de coups de coeur, avec un accent marqué pour des pièces hypnotiques, notamment d'Anish Kapoor. « Je ne suis pas une intellectuelle de l'art, je suis autonome, heureuse de rester avec mon bon et mon mauvais goût face au marché ou à la rumeur, confie Marie Taittinger. J'aime garder mes distances pour être sûre qu'une chose me plaise réellement et non pas parce qu'on dit que c'est bien ». Voilà trois ans, le couple demande à la conseillère Laurence Dreyfus d'organiser chez eux l'exposition « Something Strange Here », mêlant des oeuvres de leur collection à d'autres. S'ils ont accueilli cette exposition « pour redistribuer leur enthousiasme », leur engagement a pris une autre tournure depuis l'ouverture de leur résidence d'artistes baptisée Thaillywood à une heure et demi de Bangkok. Ils y accueillent de jeunes créateurs, comme actuellement Laurent Pernot et bientôt Simon Nicaise ou Jeanne Susplugas, mais aussi dans un second temps des artistes asiatiques, dans un esprit d'échange et de fécondation réciproque.