Dans le nord de l’Essex, deux détéctoristes de métaux prospectent régulièrement les sols de leur petite ville : Lancy et Andy excavent de temps à autres des pennies, des boutons et même quelques reliques de la Seconde Guerre mondiale. Lancy et Andy sont fictifs. Sortie en 2014 sur la BBC, la mini-série Detectorists évoque, avec un humour british délectable, un sujet que l’on connaît peu, un hobby qui pourtant existe depuis longtemps : sonder des mottes de terre pour tenter d’en extraire des traces du passé.
En France, le code du patrimoine n’interdit pas à proprement parler l’utilisation de détecteurs de métaux mais leur usage est soumis à une autorisation préfectorale pour « toute recherche de monuments ou d’objets pouvant intéresser la Préhistoire, l’histoire, l’art ou l’archéologie ». « Il y a eu et il y a toujours beaucoup de pillages de sites archéologiques en France, regrette l’archéologue Vincent Carpentier. Ils sont parfois très organisés. Les pilleurs récupèrent tout ce qu’ils peuvent et cela entraîne la destruction de nombreux sites, empêchant parfois même l’identification de soldats ». Les sites ou objets datant de la guerre de 1939-1945 sont particulièrement touchés par ces pillages. Et pour cause : en France, l’archéologie de cette période n’est devenue une discipline officielle qu’en 2013. Dans l’introduction à son livre Pour une archéologie de la Seconde Guerre mondiale (2022, éditions La Découverte), Vincent Carpentier explique que l’essor de l’archéologie préventive française y a joué un rôle déterminant : « Depuis les décennies 1980-1990, l’élargissement spectaculaire des surfaces touchées par les grands travaux d’aménagement du territoire, les autoroutes, aéroports, contournements urbains, zones d’activité, lotissements, suscita la mise en œuvre de ''grands décapages'', aptes à mettre au jour les grandes étapes de l’histoire des terroirs de même que les vestiges ensevelis d’un passé récent, à l’origine de cicatrices profondément imprimées dans le sol ».
Dans un premier temps, les archéologues s’intéressèrent aux vestiges de la Grande Guerre avec deux thèmes principaux : « la vie quotidienne des troupes au front et la gestion de la mort de masse…