Le projet de musée des féminismes est sur les rails. Voila deux décennies que Christine Bard, historienne et spécialiste de l'histoire des femmes, a espéré ce moment. Il faut dire que depuis 2000, la fondatrice du Centre des archives du féminisme (CAF) a inlassablement collecté des documents relatifs à l'histoire des associations et militantes féministes. Sans pouvoir les exposer au public faute d'espace dédié. « L'idée d'une cité des femmes à Paris avait été envisagée sous la mandature Delanoë. J'avais rédigé un projet muséographique mais il a été abandonné », explique celle qui a présenté les fonds du CAF dans des expositions virtuelles sur le site musea, et fut par ailleurs commissaire scientifique de l'exposition « Parisiennes citoyennes » au musée Carnavalet, qui vient de s'achever. Depuis, les combats féministes ont gagné en résonance au sein de la société, et l'université d'Angers, dont la bibliothèque conserve les archives collectées par le CAF, s'est engagée en 2022 à acueillir un musée des féminismes. « C'est une opportunité en or », salue l'historienne Julie Verlaine, co-présidente avec Christine Bard de l'association de préfiguration du musée des féminismes, Afémuse. Elle poursuit : « La bibliothèque universitaire Belle-Beille a démarré sa rénovation dans le cadre d'un financement État-Région. On va profiter de ces travaux pour installer des espaces d'exposition d'environ 700-900 m2 au rez-de-chaussée ». L'inauguration d'un parcours de visite retraçant l'histoire de la lutte pour l'émancipation des femmes en France, de la Révolution à la fin du XXe siècle, doit clôturer le chantier en 2027. Si l'Afémuse, créée en septembre dernier, peut d'ors et déjà s'appuyer sur un vaste fond de revues, tracts, affiches et objets témoins des grands mouvements féministes, elle compte désormais axer sa politique d'acquisition sur les œuvres d'art. « Nous manquons de productions artistiques », note Christine Bard, qui se réjouit de commencer à recevoir des dons de plasticiennes. Une souscription publique en ligne vient d'être lancée pour permettre l'achat d'une toile de 1910 représentant une scène rare de militante féministe de la première vague en plein discours. Mise en vente à 20 000 euros, cette Mme Maria Vérone à la tribune croquée par le peintre académique Léon Fauret pourrait être en bonne place sur les cimaises de la première exposition de préfiguration du musée, prévue pour 2024.