Si l'époque des Années folles évoque premièrement des images festives de cabaret, où ces dames habillées chez Poiret portent des coupes à la garçonne et boivent du champagne dans celles en cristal, ces années d'effervescence culturelle et économique sont aussi synonymes de chamboulements politiques. La révolution russe puis la fin de la guerre rebattent les cartes jusqu'à redessiner l'échiquier du Vieux Continent, sur lequel ne se déplacent désormais plus seulement des pions, mais aussi des pionnières, que l'exposition curatée par Camille Morineau, la cofondatrice d’AWARE (Archives of Women Artists, Research and Exhibitions), révèle enfin au grand public. Les nouvelles frontières provoquent des déplacements de populations, et notamment de femmes artistes, venues d'Est en Ouest en quête d'indépendance et de liberté d'expression. C'est le cas de la Polonaise Tamara de Lempicka et de la Lettone Aleksandra Belcova, qui rejoignent leurs consœurs Chana Orloff, Sonia Delaunay, Mela Muter, Marie Vorobieff... Déjà installées à Paris, les dernières ouvrent grand aux premières les portes de sa communauté artistique, alors en pleine effusion. Entre Montmartre et Montparnasse, Paris est au sommet de l'avant-garde. Les arts se rencontrent et s'accouplent, comme les amours en tout genre, si bien que les talents multiples se déclinent à tout va. Comme ses pairs Stefania Lazarska et Sarah Lipska, Marie Vassilieff, fondatrice en 1911 de l'Académie russe de peinture et de sculpture, avenue du Maine, peint et dessine autant qu'elle se prête au jeu du spectacle vivant. Car le soir, sur les scènes de la capitale, les poupées et les marionnettes aussi s'apprêtent.
« Pionnières. Artistes dans le Paris des Années folles », jusqu'au 10 juillet, musée du Luxembourg, museeduluxembourg.fr