Art Brussels est de retour ! Si la foire n'a pu se tenir en présentiel durant deux ans en raison de la pandémie, celle-ci a fait preuve d’inventivité pour continuer à accompagner ses exposants malgré le contexte, dans le cadre de l'Art Brussels Week (parcours d’expositions au sein des galeries et d'institutions partenaires) et de ses Online Viewing Rooms (OVR) hébergées par Artsy. Cette période de battement a également été l’occasion de lancer, en décembre 2021, à Anvers, la foire Art Antwerp, organisée par Art Brussels, fédérant 56 galeries en provenance de la Belgique et de ses pays frontaliers (voir QDA du 17/12/2021). Forte de son succès, l’initiative a été renouvelée et tiendra sa prochaine édition cet hiver. Après cette période de battement, les exposants sont revenus de manière massive à la foire : 88 % d’entre eux étaient au rendez-vous en 2019. « Les galeries ont confirmé leur engagement en laissant tout ou une partie de leurs avances en compte chez nous, ce qui représentait pour elles une certitude de participation dès que la foire pourrait avoir lieu. En contrepartie, Art Brussels n’a eu de cesse de les soutenir en proposant gracieusement à deux reprises une édition en ligne ou en faisant la promotion permanente des expositions dans les galeries », contextualise Anne Vierstraete, directrice de la manifestation. L’attente a valu le coup : pour son grand retour, Art Brussels n'a dû renoncer à rien et accueille le même nombre d'exposants que d'habitude (157). La foire reste également fidèle à sa répartition géographique : 36 % des galeries sont belges (parmi elles, des pointures comme Xavier Hufkens ou Rodolphe Janssen à Bruxelles) et 64 % sont internationales (telles que Laurent Godin à Paris ou Albarran Bourdais, à Madrid, toutes deux nouvelles à la foire), dont 12 % basées hors d’Europe (l'Américaine The Hole, la Sud-africaine SMAC ou des méga-galeries telles qu'Almine Rech, implantée en Europe, en Asie et aux États-Unis).
Un esprit défricheur
Seconde plus ancienne foire d’art contemporain au monde, Art Brussels a aligné son identité avec celle des collectionneurs belges, « réputés pour leur connaissance approfondie en art, leur goût de la découverte et leur audace à acheter tôt dans la carrière de l’artiste, selon Anne Vierstraete. Les collections belges résultent souvent d’une véritable passion pour l’art, d’une volonté d’accompagner l’artiste à travers les années, mais aussi de garder l’esprit ouvert pour accueillir de nouvelles tendances et défricher de jeunes talents », poursuit-elle. Cet esprit précurseur trouve son écho dans la programmation de la foire. Outre les dernières tendances de l'art contemporain, représentées dans le parcours principal, la création émergente est mise à l'honneur dans la section Discovery, déclinée pour la première fois sous la forme d’un solo et duo show, afin d’être plus lisible et de mettre ainsi davantage en valeur les jeunes plasticiens (plusieurs d'entre eux ont moins de 30 ans : Rose Barberat chez PAC, James Collins chez Claas Reiss, Megan Dominescu chez Anca Poterasu...), tandis que la section Invited regroupe les galeries émergentes ou dont le format est non-traditionnel (Office Impart à Berlin ou Suprainfinit à Bucarest). Les artistes de l’avant-garde historique, vivants ou décédés, sous-estimés ou indûment oubliés, sont pour leur part rassemblés dans la section Rediscovery (l’artiste conceptuel Vincenzo Agnetti est par exemple défendu par Osart, galerie milanaise, tandis que les œuvres textiles de l’artiste japonaise Ayako Miyawaki sont visibles chez Frédéric Moisan, Paris). Autre facteur distinctif de la foire, très apprécié par son public : son abondance de solo shows. 34 sont au rendez-vous cette année – un record pour la foire –, dont une installation in situ de dessins et écritures de l’artiste franco-algérien Abdelkader Benchamma (Templon, Bruxelles, Paris et bientôt New York) et celles du collectif d’art conceptuel Art & Language de la fin des années 60 (Mulier Mulier Gallery, Knokke).
Un miroir de l'actualité artistique
Le programme reflète également l’actualité artistique sous ses différents angles. Le boom des NFT a par exemple été pris en compte grâce à un partenariat inédit avec Parallel.art, nouvelle plateforme de conseil et production d'art mobilisant les technologies Web3 [ndlr : liées à la décentralisation et à la blockchain]. Situé au cœur de la foire, le stand Parallel.art a été pensé comme un « point de contact » NFT, c'est-à-dire comme un accompagnement proposé aux galeries pour leurs initiatives dans le domaine des NFT ou des crypto-monnaies, mais aussi auprès des futurs collectionneurs (création d’un portefeuille, acquisition de crypto-art…). Des visites guidées sont également proposées afin de découvrir les NFT sur les stands des exposants, ainsi que des conférences permettant d’aborder ce phénomène sous différents éclairages. Concomitante à la foire, la Biennale de Venise a également été intégrée à la programmation dans le cadre de l’exposition « L’Œuvre et son Double », organisée par le critique d'art et curateur Sam Steverlynck, dans le lounge de Stibbe de Tour & Taxis. Celle-ci réunit le travail de divers artistes à la Biennale cette année (Ignasi Aballí, Francis Alÿs, Mirella Bentivoglio, Latifa Echakhch, Sandra Vásquez de la Horra...), aussi bien dans l’exposition principale « The Milks of Dreams » placée sous le commissariat de Cecilia Alemani, que dans les pavillons nationaux. Certains des artistes sélectionnés présentent des œuvres issues d’une série similaire à celle de Venise, tandis que d’autres jouent avec la notion de double, de copie ou d’image miroir. Finalement, l'artiste roumain Dan Perjovschi a directement abordé le conflit russo-ukrainien dans une série de dessins en noir et blanc présentés par la galerie Michel Rein (Paris, Bruxelles). Il a également imaginé une série de cinq pin’s en soutien à l'Ukraine dont les visiteurs peuvent faire l'acquisition. Le produit de la vente de ces pièces sera versé à une association caritative engagée dans la cause. Le véritable temps fort de cette édition ? Son maintien, tout simplement : « Retrouver une édition d'Art Brussels dans toute sa dimension et sa diversité est en soi un moment très fort. Nous ressentons une très grande attente auprès de tous nos publics. De nombreux groupes de mécènes de musées sont au rendez-vous, les collectionneurs étrangers font le déplacement. Poussées dans le dos par leurs artistes, des galeries ont demandé d’agrandir leur stand… L’enthousiasme est perceptible à tous les niveaux, et c’est cette fête de l’art contemporain que nous souhaitons plus que jamais célébrer à l’occasion d’Art Brussels 2022 ! », résume Anne Vierstraete.