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Exclusif : la vente Dorville n'était pas spoliatrice, juge la Commission d’indemnisation des victimes des spoliations 

Exclusif : la vente Dorville n'était pas spoliatrice, juge la Commission d’indemnisation des victimes des spoliations 
Monika Grütters, ministre allemande de la Culture, restituant trois œuvres d'art pillées par les nazis à Francine Kahn, petite-nièce d’Armand Dorville, à Berlin, le 22 janvier 2020.



© Christoph Soeder/dpa Picture-Alliance via AFP.

Jean Castex doit rendre publique vendredi la recommandation de la Commission d’indemnisation des victimes des spoliations (CIVS) sur la dispersion en 1942 à Nice de la collection d’Armand Isaac Dorville. Le 16 mai, la CIVS a rendu son avis, que Le Quotidien de l’art a pu consulter : cette vente de succession se serait déroulée sans violence. Les fonds ont bien été bloqués par le commissariat aux questions juives, mais ils ont pu être rendus aux héritiers en 1947, lesquels ont donné quitus à l’exécuteur testamentaire, un ami du défunt. De plus, la famille n’a pas demandé la nullité après guerre. Tout en concluant que « la vente n’était pas spoliatrice », la CIVS recommande de rendre 12 œuvres acquises par le Louvre, dans la mesure où son conservateur a rencontré l’administrateur chargé de l’aryanisation de la vente. Le Louvre et le ministère de la Culture ont défendu cette position « morale ». La famille est quand même priée de rembourser le prix de vente et la CIVS ne recommande pas de rendre les autres œuvres de la collection acquises par les musées après la guerre. Cette position diffère de celle de l’Allemagne qui a déjà restitué plusieurs tableaux aux descendants. Pour la famille, la vente était bien spoliatrice, toute la procédure s’étant déroulée en application des lois raciales. Elle reproche aussi à la CIVS de n’avoir tenu aucun compte du fait que la sœur d’Armand Dorville, ses filles et ses petites-filles n’ont jamais pu percevoir les fruits de la succession, puisqu’elles ont été arrêtées et assassinées à Auschwitz en 1944. La CIVS ayant fait observer que seule la justice a l’autorité pour annuler une vente spoliatrice, les musées risquent de se retrouver confrontés à un nouveau procès.

Article issu de l'édition N°2178