Ce n’est pas qu’une critique de l’entertainment (c’est aussi de l’entertainment) ; ce n’est pas que de la poésie (la rencontre fortuite d’un lampadaire et d’un aquarium), ce n’est pas que l’impression d’avoir la berlue ou la mise à nue des apparences : ce sont, mêlées, les catégories d’entendement et de rangement du monde.
La farce apparaît comme un premier ressort : grillager des poules dans une voiture de flics, grimer une voiture sans permis en Ferrari de carton-pâte, enchâsser dans une galerie d’art un rocher pris par le bitume, constituent autant de reconductions des charivaris moqueurs des carnavals populaires, dans lesquels l’image du roi se fond dans celle du bouffon.
Le geste appelle la moquerie d’un ordre établi – y compris celui dans lequel l’artiste se doit d’être sérieux. Si les installations-slash-sculptures-slash-performances participatives de Bufalino s’apparentent à des mots-valises, sans doute faut-il y voir le miroir nos ambivalences profondes à l’égard de l’art, et des impasses sur lesquelles nous butons tout en les construisant : le fun et le snob, l’espace public et l’enceinte exclusive de l’entre-soi, la générosité et l’ascétisme, s’assemblent pour former un portrait-robot du monde de l’art en Tartufe.
Benedetto Bufalino ne se gêne pas pour rire de lui-même, dans un éclat ou un éclatement salutaire dressant un miroir grimaçant face à nos postures collet monté. Pour le festival Do Disturb en 2017, Benedetto déroulait un tapis orange sur le palier d’honneur du Palais de Tokyo, et y faisait jouer l’équipe…