Il y a du beau monde parmi les descendants de Jules Strauss (1861-1943), brillant banquier de Francfort, qui fit toute sa carrière à Paris, avant de se consacrer entièrement à sa collection après la Grande Guerre. On y trouve Michel Strauss, 84 ans, expert très renommé de Sotheby's en matière d'impressionnisme, pionnier des ventes par téléphone et des ventes spécialisées, qui eut Bruce Chatwin comme collègue catalogueur à ses débuts ; son fils Andrew, tout aussi réputé, qui vient de quitter la même maison après y avoir passé 37 ans ; Édouard Baer, comédien nommé aux Césars en 2019 et qui a obtenu un Molière en 2020 ; son frère Julien Baer, chanteur ; sa sœur Pauline Baer de Perignon, écrivain et animatrice d'ateliers d'écriture. Tous gens du milieu artistique, curieux et cultivés. Pourtant, jusqu'à il y a quelques années, aucun d'entre eux n'était au fait de spoliations à l'encontre de leur grand-père et arrière-grand-père. Par pudeur, désir d'oubli ou désintérêt, la famille se transmettait une version miraculeuse de l'Occupation : Jules Strauss, banquier juif et collectionneur de premier ordre, n'aurait été ni rançonné ni déporté – il avait juste dû déménager, son appartement de l'avenue Foch ayant été réquisitionné par les autorités nazies. Il a fallu deux documents réapparus de manière inopinée - une attestation du garde-meuble parisien Tailleur, rue du Bac, et une plainte pour vol déposée en 1958 – pour révéler une tout autre version de l'histoire.
La longue quête d'un Largillière enfin récompensée
Le musée de Dresde vient de rendre aux descendants du banquier parisien Jules Strauss, spolié pendant la Seconde Guerre mondiale, un superbe portrait allégorique de Nicolas de Largillière. La saga de ce tableau illustre le long chemin semé d'embûches des restitutions.