Le Quotidien de l'Art

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« Pour la réouverture, nous devons prendre en charge les contraintes en développant l'imaginaire »

« Pour la réouverture, nous devons prendre en charge les contraintes en développant l'imaginaire »
José-Manuel Gonçalvès.
© Jean-François Spricigo./Courtesy Centquatre-Paris

José-Manuel Gonçalvès, directeur du CentQuatre (Paris)

« Nous sommes restés discrets pendant l'épidémie car le silence permet de réfléchir. Par ailleurs, nous voulions avant tout communiquer auprès de notre public de proximité. Notre établissement mêle de nombreuses disciplines et pratiques, et croise plusieurs registres légaux : la réouverture est donc une véritable gageure. Mais nous avons l'obsession de faire retrouver au public ce lieu de création. Nous travaillons actuellement à la mise en conformité selon le respect des règles sanitaires, d'abord pour que nos équipes puissent revenir travailler sur place : il faut revenir au concret et à la matière, après une période de déréalisation, et presque d'hallucination, même si c'est très compliqué. Nous espérons pouvoir rouvrir dans une quinzaine de jours (autour du 30 mai, ndlr), notamment pour les équipes créatives qui travaillent au CentQuatre – les start-ups, l'agence d'architectes, la galerie, les ateliers pour les artistes –, mais aussi pour le public, en permettant la circulation et en réactivant le lieu par petites sections, en limitant les groupes à 10 personnes.

Ce qui importe pour nous est de reprendre contact, via les associations locales et le bouche-à-oreille, avec les habitants du quartier. Cependant on ne pourra pas, pour l'instant, accueillir les pratiques "spontanées" dans la nef, pour des raisons évidentes de respect de la distanciation physique. L'exposition "Circulations", qui a ouvert le 14 mars avant d'être immédiatement fermée, n'a pas été démontée, et nous souhaitons qu'elle puisse être visible jusqu'à fin juillet. Nous envisageons également de rouvrir la Maison des Petits, en respectant une jauge très restreinte, car c'est important pour les familles de pouvoir sortir à nouveau avec leurs enfants. Nous devons prendre en charge les contraintes en développant l'imaginaire, comme une nouvelle règle du jeu, en se servant des espaces et des forces en présence pour faire respecter les flux. Mais si les mesures sont trop complexes, les familles ne reviendront pas. 

En ce qui concerne l'aspect financier, nous vivons à 50 % de ressources propres, grâce aux locations et à l'ingénierie : celle-ci nous permet notamment de piloter la commande des 68 "Tandems" (architecte/artiste) du Grand Paris Express, qui a maintenu ses engagements et payé les phases préparatoires. L'attention aux artistes est pour nous primordiale : ainsi les artistes et techniciens dont les interventions ont été annulées ont été dédommagés, tandis que 30 à 40 % de ce que nous n'avons pas pu maintenir est reporté à l'an prochain, qui sera donc très chargé. Nous devons donner aux artistes la visibilité que nous leur avions promise. Cela va être difficile à amortir économiquement, mais la Ville de Paris s'est engagée à nous soutenir. Pour les années qui suivront, il faut absolument réfléchir à ralentir, à cesser la fuite en avant perpétuelle. »



104.fr

Article issu de l'édition N°1949