Jan Hoet est décédé le 27 février à Gand. Cette figure rare et inclassable, Belge visionnaire né en 1936, a permis la naissance au forceps du musée d'art contemporain - Stedelijk Museum voor Actuele Kunst (SMAK) - de Gand. En 1986, il conçoit l'exposition-manifeste « Chambres d'amis », où il invite les habitants de la ville à accueillir chez eux des oeuvres d'art et à ouvrir leurs portes au public. En 1992, il décroche la Documenta de Cassel, un de ses grands rêves de synthèse. Incapable de se résoudre à une quelconque retraite, il dirigera de 2003 à 2008 le MARTa Herford, en Allemagne. Le critique et commissaire d'exposition Denys Zacharopoulos, membre de l'équipe de Jan Hoet pour la Documenta de 1992, revient sur son parcours.
R. A. L'accouchement du SMAK à Gand a été difficile. Comment Jan Hoet a-t-il réussi finalement à imposer ce musée ?
D. Z. Le projet a commencé très tôt dans le musée des beaux-arts de la Ville, où Jan a fait entrer l'art contemporain. Il a fait venir des artistes, et pas des moindres, Beuys, Fabro, Panamarenko, au milieu des années 1970. Fin 1979, il a fait la grande exposition « L'art en Europe après 1968 ». Elle réunissait les plus grands artistes, de Richard Long à Mario Merz. C'était un laboratoire extraordinaire, avec Jan au milieu de tout cela. C'est à cette occasion que nous nous sommes connus. Je suis allé pour le féliciter. Il se plaignait car on venait d'annoncer la Documenta de Rudi Fuchs de 1982, avec un budget important. Jan était passionné et expressif et il disait : « Mon Dieu, avec cet argent, je pourrais faire vivre le musée pendant dix ans. Alors qu'une Documenta, que reste-t-il après cent jours ? » Je lui ai dit que s'il continuait à faire des expositions comme « L'art en Europe », dans dix ans, ce serait lui qui ferait la Documenta. Il m'a dit :…