La limite entre l'appropriation et le plagiat étant devenue poreuse, le phénomène de la contrefaçon a pris ces dernières années une ampleur sidérante. « On trouve de plus en plus facilement des images et des sources d'inspiration sur Internet, constate l'avocat parisien Philippe Dutilleul-Francoeur. Mais l'artiste est aussi rapidement informé des emprunts. Il suffit qu'un de ses amis se balade quelque part, l'appelle avec son smartphone et lui envoie des images de contrefaçon pour qu'il soit vite au courant ». Les plagiés n'en rechignent pas moins à porter les affaires devant les tribunaux, car, selon l'avocate parisienne Agnès Tricoire, « les rapports de force ne sont pas dans leur culture. Ce sont des proies très faciles ». « Ils sont plus sensibles quand on détourne leur oeuvre hors du milieu artistique, précise toutefois Philippe Dutilleul-Francoeur. C'est une appropriation qu'ils jugent plus violente. C'est un détournement commercial, marketing, dans des industries qui drainent beaucoup d'argent. Et l'artiste ne veut pas que, sans son autorisation, l'oeuvre serve de vecteur à une consommation de masse ». Dans la publicité, et par extension dans le domaine du luxe, la reprise ou variante non autorisée est devenue monnaie courante. « Les principaux pilleurs des oeuvres des artistes, ce sont les publicitaires. Ils ont comme salariés des “créatifs”, dont le métier n'est pas de créer mais de piller, déplore Agnès Tricoire. C'est la génération Internet, qui est dans le téléchargement illégal et qui n'a pas le même respect du droit d'auteur ». Bien souvent, ces affaires sont réglées à l'amiable. Car les marques, qui ferraillent elles-mêmes souvent contre la contrefaçon, n'aimeraient pas que leur image soit écornée…