Vendredi 7 mars, sous les ors du Palais-Royal, trois personnalités, représentant trois formations politiques, étaient réunies pour évoquer devant la presse leur action contre les violences et le harcèlement sexuels et sexistes (VHSS) dans la culture : la ministre Rachida Dati (ex-LR), et les députés Erwan Balanant (MoDem) et Sandrine Rousseau (EELV), respectivement rapporteur et présidente de la commission d’enquête relative aux violences commises dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel, de la mode, de la publicité et du spectacle vivant. Après avoir auditionné pendant six mois des dizaines de victimes et personnes mises en cause dans ces secteurs, celle-ci doit rendre son rapport, très attendu, début avril. Interrogée en marge de la conférence de presse au sujet de l'absence des arts visuels dans cette enquête, malgré les alertes et affaires récentes, Sandrine Rousseau regrette : « Le spectre est très large, nous n'avons pas non plus abordé le secteur de l'édition... Ce rapport va évoluer, et ce qui devrait être proposé dans le règlement et la loi touchera les arts visuels : ce sont les mêmes problématiques. » De son côté, Rachida Dati a indiqué que les auditions de la commission avaient permis d'orienter certains axes du « nouveau plan de lutte contre les VHSS dans la culture 2025-2027 », qu'elle a résumé par la formule : « Mettre fin à la loi du silence. » Dans le détail, en ce qui concerne plus spécifiquement les arts visuels et le patrimoine, le plan prévoit de prévenir et former plus massivement, en étendant la conditionnalité des aides au respect des obligations en la matière, en rendant obligatoires les formations sur le sujet pour les agents et responsables de structures (proposées également aux artistes-auteurs et étudiants), et en nommant des référents à tous les niveaux. Second axe : mieux repérer et signaler, par un suivi plus serré des signalements, un renforcement de la cellule opérée par Audiens – dont le directeur Frédéric Olivennes confiait lui aussi en aparté que les arts visuels, par manque de structuration professionnelle, restent encore trop dans l'angle mort – et un élargissement des prérogatives de l'inspection du travail dans les diverses professions. Ensuite, agir et prendre des mesures rapidement, notamment par une meilleure communication concernant l'assistance téléphonique (le 01 87 20 30 90) et les processus d'enquête interne. Dernier axe : renforcer l’accompagnement des victimes, notamment dans les établissements d'enseignement supérieur (mesures conservatoires, dépôt de plainte, soutien psychologique), pour la rédaction d'une plainte au procureur de la République, et par l'aide financière pour une assistance juridique. Un autre volet concerne l'accompagnement des mineurs, en particulier dans le cinéma et le spectacle vivant. Par ailleurs, suite à la controverse suscitée par la négligence de la Cinémathèque, une feuille de route a été adoptée afin de « renforcer l’accompagnement de la projection de films au regard des valeurs de notre époque » (sans que celles-ci soient définies précisément). En ce qui concerne le secteur privé dans les arts visuels, notamment celui des galeries qui ne relèvent pas de la tutelle du ministère, Irène Basilis, haute fonctionnaire à l’égalité, la diversité et la prévention des discriminations, confie « croire en l'exemplarité, et aussi aux leviers, notamment les aides que peuvent recevoir les galeries. Elles vont avoir du mal à rester en retrait, sachant qu'elles doivent faire face à des problèmes de réputation ». Autre sujet brûlant : l'affaire de l'ancien cadre de la Rue de Valois, accusé d'avoir administré des diurétiques à près de 300 femmes à leur insu pour les forcer à uriner devant lui, et révoqué en 2019, dix ans après les premières alertes. La ministre a annoncé la réactivation, au 1er mars, de la cellule d’accompagnement psychologique, et la généralisation du dispositif d’indemnisation des victimes (agentes ou non). En février 2023, le tribunal administratif de Paris a condamné l’État à verser des dédommagements au titre de préjudices, « sans qu’il soit besoin d’examiner les autres fautes de l’administration ». Irène Basilis réitère à ce sujet que « le ministère a été condamné, mais en l'exonérant d'une faute » – une décision que conteste la CGT Culture, qui considère que le ministère nie sa responsabilité, les faits, connus de supérieurs hiérarchiques, n'ayant pas été signalés avant plusieurs années. Le procès au pénal, pour lequel l’État s’est porté partie civile, devrait ouvrir, selon nos informations, à la fin de l'année.
Le ministère de la Culture dévoile son plan contre les violences et le harcèlement sexuels et sexistes

Photo : Magali Lesauvage.