« Aujourd’hui les musées sont conscients qu’à travers leurs expositions et les connaissances que celles-ci fournissent, ils doivent aussi être des lieux de réponses. Nous ne sommes plus dans le concept très romantique du musée comme espace coupé du monde. Les idées qui agitent le monde au-delà de ses murs doivent être ses préoccupations », insiste Constance Rivière, directrice du musée de l’histoire de l’immigration à Paris, qui présente jusqu'au 9 février « Chaque vie est une histoire ». Alors qu'en 2024 les élections en France ont fait état d’un repli identitaire – avec notamment la percée aux législatives du Rassemblement national, parti d'extrême droite, avec 32 % des voix –, ces institutions renommées que sont le musée de l’Homme, le musée de l’histoire de l’immigration, le Louvre-Lens, le Mucem et le Muséum de Bordeaux proposent à leurs visiteurs une programmation hautement engagée, avec pour gageure de faire un pied de nez aux obscurantistes en insistant sur l’universalité du sujet traité. L’immigration ne concerne-t-elle pas en effet une majorité de la population ? C'est, rappellent-elles, l’histoire de l'humanité entière qui, depuis la nuit des temps – à en croire Homère –, chante les déplacements humains, la volonté qu'ils nécessitent, les désirs qu'ils projettent et l’insatiable création qui en émane.
Entre banalisation et empathie
Selon Dominique de Font-Réaulx, commissaire de l’exposition « Exils. Regards d'artistes » au Louvre-Lens (jusqu'au 20 janvier), il n’y a pas d’esthétisation propre à l’exil : « C’est une notion qui constitue le cœur de la création, souvent son fondement, et certainement l'une des thématiques les plus fortes et les plus anciennes de la conception artistique. » Le déplacement préexiste à nos préoccupations contemporaines, comme cela est démontré dès le début de l'exposition. Le thème d’Adam et Ève chassés du Paradis, que l’on retrouve sous le pinceau de Giuseppe Cesari au XVIe siècle dans une version sombre, où le…