Le Quotidien de l'Art

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Laura Henno : « Il faut mettre des visages sur le chaos de Mayotte »

Laura Henno : « Il faut mettre des visages sur le chaos de Mayotte »
Laura Henno, "Koropa", 2016, film HD, 20 min.
Courtesy de l'artiste et galerie Nathalie Obadia.

« C'est l'apocalypse », s'alarme la photographe Laura Henno, jointe par téléphone quelques jours après le cyclone Chido qui a dévasté Mayotte le 14 décembre. Le bilan provisoire établi par le ministère de l'Intérieur fait état, à l'heure où nous écrivons ces lignes, de 31 morts, près de 1 400 blessés, et des milliers de sans-abris dont le nombre est impossible à déterminer – à Mayotte, 100 000 personnes vivent dans la clandestinité, sur un total de 320 000 habitants. Tandis que certains quartiers ont été entièrement rasés, les communications restent coupées. Depuis plus de dix ans, Laura Henno photographie et filme des jeunes sans-papiers vivant dans des maisons de tôle (bangas) dispersées dans la mangrove. La photographe a mis plusieurs jours avant de réussir à en joindre certains, elle est sans nouvelles d'autres, comme Kamel et MKT : « Plusieurs jeunes que je suis sont sans-papiers, ils ne se rendent pas dans les centres d'hébergement d'urgence. » Leurs visages, qu'on a pu revoir au printemps dernier à la galerie Obadia, nous sont devenus familiers : Fahir, dit Patron, jeune garçon au regard immense qu'on voit dans le court-métrage Koropa (2016) apprendre à faire passer des clandestins des Comores à Mayotte, Fayal, Mokatir et Eli, ses cousins, Smogi et son chien Djo, filmés sur les hauteurs de Mayotte en 2019, la bande des « Boucheman », ces gamins que Laura Henno a suivis vers l'âge adulte... « Les jeunes de la photo Les Hauts étaient tous ensemble ce midi. Ils vont bien mais la plupart sont sans-abris, sans rien à manger ni à boire. Aucune aide alimentaire ou eau n'a été distribuée », poursuit Laura Henno, qui souffle : « Il faut mettre des visages sur le chaos. »

Laura Henno, "Djoubi et sa meute", Mayotte, 2018. Tirages jet d’encre à pigment, 100 x 150 cm.
Laura Henno, "Djoubi et sa meute", Mayotte, 2018. Tirages jet d’encre à pigment, 100 x 150 cm.
Courtesy de l'artiste et galerie Nathalie Obadia.
Laura Henno, "Les Hauts", Mayotte, 2022. Tirages jet d’encre à pigment,100 x 150 cm.
Laura Henno, "Les Hauts", Mayotte, 2022. Tirages jet d’encre à pigment,100 x 150 cm.
Courtesy de l'artiste et galerie Nathalie Obadia.
Laura Henno, "MKT", Mayotte, 2018.Tirages jet d’encre à pigment, 74 x 110 cm.
Laura Henno, "MKT", Mayotte, 2018.Tirages jet d’encre à pigment, 74 x 110 cm.
Courtesy de l'artiste et galerie Nathalie Obadia.

Article issu de l'édition N°2958