Première œuvre de Gustave Courbet achetée par l’État français, récompensée au Salon de 1849, L’Après-dînée à Ornans vient d’être ré-accroché au palais des Beaux-Arts de Lille, après une restauration qui a donné du fil à retordre au Centre de recherche et de restauration des musées de France. Ce tableau n’avait a priori jamais été nettoyé. Constat contredit par un article retrouvé récemment : la toile aurait fait l’objet d’une intervention en 1920, après avoir été endommagée au cours d’un périple organisé par les autorités allemandes jusqu’en Belgique. La fluorescence dans l’ultraviolet a révélé la présence de deux vernis épais et oxydés qui limitaient la lisibilité des empâtements pourtant propres à la pratique de Courbet. La radiographie a dévoilé des repentirs, aussi typiques du peintre qui ne produisait que peu de dessins préparatoires. Par exemple, le chien campé sous la chaise, à gauche, a été effacé au profit de celui qui apparaît aujourd’hui au centre de la composition. Et les experts d’être bientôt gênés par la découverte d’un jus sombre qui serait le fruit d’une restauration postérieure à 1920, aurait masqué les repentirs et nivelé la surface du tableau, au point de gommer les traces de litharge. Cette remontée de grains de céruse, qui confère un aspect granuleux à toute surface picturale, s’explique chez Courbet par l’excès de plomb dans ses préparations. L’Après-dînée a retrouvé ses couleurs et son relief au prix d’une vigilance et d’une délicatesse aiguës, mais plusieurs questions demeurent : le doublon de la chaise situé à l’extrême gauche serait-il un ajout du peintre ou un repeint ? Dans le doute, le C2RMF n’a pas recouvert ce motif, pourtant jugé incohérent. De quand date la deuxième restauration ? Pourquoi la toile n’est-elle pas signée ? Qui est qui ? Certains voient Courbet lui-même et son grand-père sous les traits des personnages respectivement identifiés comme Urbain Cuenot et son père, Régis Courbet.
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