Dans la mémoire militaire française, son nom évoque la cuisante défaite infligée par l’armée britannique aux troupes françaises et espagnoles lors de la bataille de Trafalgar du 21 octobre 1805. Outre-Manche, il est étroitement associé au destin de l’amiral Nelson, fauché à son bord par les balles d’un franc-tireur français du Redoutable. Construit en 1759, le HMS Victory a traversé les guerres et les siècles, demeurant à ce jour le seul navire témoin de la guerre d'indépendance américaine, des guerres révolutionnaires françaises et des guerres napoléoniennes. Assailli par les canons hier, il l'est aujourd'hui par les infiltrations d'eau et plus de 10 000 coléoptères : depuis mai 2022, il fait l’objet d’une campagne de restauration d’envergure au Royal Naval Museum de Portsmouth, dans le sud de l’Angleterre. Son budget, de 45 millions de livres (53 millions d'euros), en fait le deuxième chantier plus coûteux d’Europe, après celui de Notre-Dame de Paris. Quinze charpentiers navals sont actuellement à pied d'œuvre sur la coque et le châssis, assistés de chercheurs en archéologie maritime de l'Université de Southampton. Les travaux, s'étalant sur dix ans, associent les techniques de restauration tricentenaires aux outils technologiques d'aujourd'hui : des étudiants ont ainsi développé un algorithme basé sur l'Intelligence artificielle pour faciliter le stockage des clichés pris depuis 2022 pour le modèle numérique 3D du navire. « Ce travail a repoussé les limites de ce que ce type d'IA est capable de faire, car nos images sont extrêmement haute résolution, complexes et détaillées, a déclaré sur le site de l'Université Rodrigo Pacheco-Ruiz, chercheur invité en archéologie maritime. Le projet est vraiment à l'avant-garde de la façon dont l'IA est utilisée en archéologie - nous démontrons ce qui est possible. » En France, à Anglet, la réplique d’un autre navire de légende, l’Hermione, fait aussi l’objet de travaux depuis deux ans. L’association qui gère la restauration cherche encore à collecter auprès de ses partenaires et des particuliers les 4,5 millions d’euros qui manquent aux 10 millions budgétés, dans l'espoir d’une remise à l’eau en 2026 pour les célébrations du 150ᵉ anniversaire de l’indépendance américaine.
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