Un de plus et ils auraient été 333... Le nombre fait la force dans l'exposition internationale de la 60e Biennale de Venise, dont la liste d'artistes a été annoncée ce mercredi. Le commissaire général, le Brésilien Adriano Pedrosa, a ratissé large pour son thème, rengaine des populistes, « Foreigners Everywhere », ici traité, on l'imagine, de façon fort différente... De Pacita Abad à Bibi Zogbé, on y trouve aussi bien des figures historiques (comme Aloïse, Tina Modotti, Filippo De Pisis ou un géant de la céramique Art nouveau, Galileo Chini) que des artistes à peine affirmés, les plus jeunes étant la Libanaise Joyce Joumaa (née en 1998), la Libyenne Nour Jaouda et le Bolivien River Claure (nés en 1997). Le tropisme pour l'Amérique latine ne se cache pas, avec une belle brochette de noms, des célèbres Frida Kahlo et Joaquín Torres García aux plus anonymes, comme ces « arpilleras » (tisseuses) chiliennes non identifiées, et couvre tous les registres, de la peinture traditionnelle aux installations les plus conceptuelles (Teresa Margolles). À l'heure de la loi immigration et du souhait de certains de mettre des bâtons dans les roues des aspirants résidents (notamment avec la caution pour étudiants étangers, censurée par le Conseil constitutionnel), il n'est pas inintéressant d'étudier la place de la France dans ce florilège d'artistes nomades. Ils sont près de 10 % du total à y avoir passé une bonne partie de leur carrière, par goût ou contrainte (exil), enrichissant la scène locale. Des noms ? Etel Adnan (décédée en 2021), Gino Severini (1883-1966), Wifredo Lam (1902-1982), le peintre égyptien Ezekiel Baroukh (1909-1984), le naïf brésilien Cícero Dias (1907-2003), le photographe et projectionniste à l'Entrepôt, Bouba Touré (1948-2022) ou Bona Pieyre de Mandiargues (1926-2000), nièce de De Pisis et épouse de l'écrivain. Parmi ceux qui sont encore actifs : Nil Yalter, Giulia Andreani, Iván Argote, Daniel Otero Torres... Dans un monde qui érige des barrières en pagaille, qui veut déporter l'autre et où le mur mexicain pourrait coûter sa réélection à Biden, cette façon de se jouer des frontières est une parabole bienvenue.
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