Le Pop Art a perdu l’une de ses figures historiques avec la disparition du sculpteur britannique Joe Tilson. C’est la famille de l’artiste qui a annoncé son décès le 9 novembre à Londres, alors que les galeries Marlborough et Cristea Roberts viennent de lui consacrer une exposition pour célébrer ses 95 ans. Né en 1928 dans le quartier londonien de Lewisham, Tilson stoppe ses études à 15 ans pour suivre une formation d’ébéniste à l’école de Brixton, sous la pression de ses parents, en pleine Seconde Guerre mondiale. Sa vocation d’artiste naît suite à un concours organisé par le comté de Londres pour la confection d’une bannière de sécurité routière. Il remporte le prix : un livre sur Giotto, qui le fascinera. Tilson sert dans la Royal Air Force au lendemain de la guerre, puis décroche en 1949 une bourse pour intégrer la Saint Martins School, où il enseignera de 1958 à 1963. Diplômé du Royal College of Art en 1955, Tilson y côtoie notamment Peter Blake, fer de lance du mouvement que le critique Lawrence Alloway nommera « Pop ». Lauréat du prix de Rome la même année, Tilson s’installe en Italie où il se marie à l’artiste Joslyn Morton. Il surfe ainsi sur la vague Pop qui se nourrit du mythe américain dans des œuvres telles que Wood Relief (1961), où Tilson déploie tout son savoir-faire d’ébéniste pour sculpter des éléments en volume, qu’il assemble et recouvre de peinture acrylique, de collages photo ou de textiles. Les années 1960 sont fastes : une première exposition personnelle à la galerie Marlborough (1962), une participation à la Biennale de Venise de 1964 où triomphe Rauschenberg, un semestre passé à la School of Visual Art de New York (1966). Tilson se détache néanmoins de sa fascination pour l’Amérique et présente Is This Che Guevara ? (1969), un ensemble de sérigraphies représentant des héros révolutionnaires (Mao, Malcolm X, Hô Chi Minh). « Les tirages ont été incroyablement mal accueillis », se souvenait l’artiste. Dans les années 1970, il se retire dans la campagne du Wiltshire avec sa famille, et s’éloigne des feux de la rampe : « La pire décision de ma carrière », avouera-t-il. Sa première rétrospective a toutefois lieu au Boijmans de Rotterdam en 1971, alors qu’il multiplie les séjours en Italie. Il travaille la gravure et l’impression sur papier à Cortone et Venise, où se trouve son atelier, et puise son inspiration dans la culture méditerranéenne. En 1991, il est élu à la Royal Academy, qui lui offre une rétrospective en 2002. Ses œuvres appartiennent aux collections de la Tate, du Stedelijk ou du MoMA.