Avec ses 191 participants dont plus de 150 galeries réparties en trois secteurs auxquels s’ajoutent 36 éditeurs, Paris Photo s’affirme une nouvelle fois comme le vaisseau amiral de la myriade d’événements dédiées à la photographie en novembre dans la capitale. Pour cette 26e édition, et dernière au Grand Palais Éphémère, sa directrice Florence Bourgeois reste sur les fondamentaux tout en renouvelant la foire.
800 artistes
La présence nationale est en forte hausse : 32 % des galeries du secteur principal et près de 40 % de Curiosa, dédié à l’émergence, sont en effet françaises. Ce dernier est conduit par la nouvelle directrice artistique Anna Planas, ancienne responsable de la librairie delpire & co, et présente 16 solo shows de galeries venues de 9 pays. Avec près de 300 femmes sur quelque 800 artistes exposés, Paris Photo est « fière », selon les mots de Florence Bourgeois, d’avoir fait bouger les lignes, notamment grâce au parcours Elles x Paris Photo, reconduit avec une sélection de 36 artistes. Elles ont été choisies par Fiona Rogers qui dirige un programme visant à soutenir les femmes photographes au Victoria & Albert Museum. En guise de célébration des cinq ans de cette initiative soutenue par le ministère de la Culture, la foire a impulsé un livre rassemblant 130 témoignages de femmes artistes internationales (éditions Textuel).
Poussée numérique
La principale nouveauté 2023 est la création du secteur Digital, confié à Nina Roehrs, spécialiste en art et technologie. Il compte neuf galeries, dont deux « plateformes curatées en ligne » qui n’ont donc pas de lieu physique. Tout en demeurant la foire de la photographie traditionnelle, du XIXe siècle, de la période moderne et de la création contemporaine, Paris Photo défriche donc du côté du virtuel avec des œuvres nées des algorithmes et autres codes – une première pour l’Europe. Au programme : des tirages, mais aussi des sculptures, des applications, ou encore des NFT – des pièces qui d’ordinaire n’ont pas leur place dans une foire. Cette initiative semble arriver à point nommé, les images générées par l’intelligence artificielle étant de plus en plus nombreuses car les outils pour les créer se démocratisent. Mais si l’IA fait débat, notamment dans le secteur de l’information, en matière de création, elle contribue aussi, par réaction, à remettre la matérialité sur le devant de la scène.
Sculptures et tapisseries…
Ainsi, alors que le virtuel et l’immatériel gagnent du terrain depuis une vingtaine d’années avec l’essor du numérique, l’objet photographique n'a jamais été aussi « physique ». On en veut pour preuve le polyptyque de 17 mètres de long de Pascal Convert à la galerie RX, ou les pièces uniques, de plus en plus nombreuses sur la foire : les Polaroid de Tom Wilkins chez Christian Berst Art Brut, les sculptures de Sinta Werner (Alexander Levy), les tapisseries d’Ana Teresa Barboza (Robert Mann), les photogrammes de Rebekka Deubner (Jörg Brockmann) ou encore les tirages argentiques sur verre d’Anaïs Boudot chez Binome. Il y a aussi ce qu’Anna Planas nomme les « œuvres organiques » avec des pièces mixant les médias à découvrir dans le secteur Curiosa. La matérialité s’incarne aussi dans les tirages du XIXe siècle, comme chez Hans P. Kraus. La boucle est bouclée.
Florence Bourgeois
« Les yeux sur 2024 »
« Nous sommes partis du constat que de plus en plus d’artistes utilisent les nouvelles technologies et le numérique, comme en témoignent les NFT, et que cela suscite de la curiosité. En tant que première foire mondiale de photographie, on ne peut pas ignorer ce phénomène. Cela va intéresser un nouveau public et, j’espère, aussi les habitués. On ne sait pas encore ce que cela va donner en termes de marché. Le futur de Paris Photo, c’est aussi le retour au Grand Palais en 2024. Nous allons passer de 12 000 à 21 000 m2. Nous réfléchissons à de nouveaux secteurs, peut-être rouvrir celui consacré aux films, avoir des expositions différentes de nos partenaires, revoir les choses en termes de circulation des visiteurs… Une chose est sûre : nous accueillerons de nouveau une collection institutionnelle en 2024. »