À une époque où l'on dit l'Occident blasé et dépolitisé, la Biennale de Gwangju montre une résilience certaine. Il faut dire que la ville du sud-ouest, connue comme la capitale coréenne du syndicalisme et des mouvements de gauche, a un pedigree particulier. C'est ici qu'en mai 1980 une manifestation d'étudiants, protestant contre l'instauration de la loi martiale, a progressivement grossi avant d'être réprimée dans le sang, faisant un millier de morts mais donnant le coup d'envoi au mouvement démocratique. On oublie souvent que le pays a été une dictature jusqu'à cette décennie 1980 et que sa transition politique est aussi impressionnante que sa croissance économique, bien connue : se relevant à peine de la terrible guerre civile qui l'avait amputée de la moitié du territoire, la Corée du Sud était encore un pays pauvre dans les années 1960, avec un PIB par habitant d'à peine 100 dollars (30 fois inférieur à celui des États-Unis !). En 1980, le rapport s'était largement amélioré (7 fois inférieur) et n'a cessé de le faire (à 35 000 dollars aujourd'hui, il flirte avec celui de la France et représente la moitié de celui des États-Unis). Mais cette prospérité insolente n'a pas effacé les traces de l'histoire, la biennale ayant été lancée en 1995 avec cette dimension mémorielle.
Bronca contre Park Seo-Bo
C'est ainsi que lors de l'inauguration de la 14e édition, le 6 avril, le vénérable Park Seo-Bo, 91 ans, gravement malade mais stoïque sous la pluie battante, n'a pas été protégé par son statut…