Si d'aventure, il vous était possible de franchir les portes des salles de garde, ces lieux dédiés aux repas, au repos et à la distraction des internes, un détail vous interpellerait sans doute : les murs y sont habillés de peintures graveleuses. Initiées au début du XIXe siècle, ces décorations murales n'ont, dans un premier temps, rien d’obscène et représentent les valeurs de la médecine selon les canons académiques. À la fin du siècle, elles évoluent vers la caricature, qui connaît son âge d’or. La dimension licencieuse n’apparaît qu’au moment de la libération sexuelle des années 1960 et s’accentue au fil des ans pour revêtir un caractère grivois. Elles sont aujourd'hui le fruit d’une nébuleuse d’influences, aussi bien cinématographiques, historiques, qu’issues de l’univers de la bande dessinée et de la pop culture. De même, les références aux chefs-d'œuvre de l’histoire de l’art abondent, renouvelant par le prisme de la parodie les peintures de Jérôme Bosch, Léonard de Vinci, Michel-Ange ou Jacques-Louis David. Autre élément symptomatique de ces priapées : y sont souvent ajoutées des blagues concupiscentes ou des réflexions suggestives. Ces graffitis ne sont pas sans rappeler les fresques pornographiques qui ornaient les lupanars, les tavernes et les bains publics de Pompéi, elles aussi marquées par des inscriptions égrillardes. Enfin, si la plupart sont réalisées par des médecins ou de jeunes élèves des Beaux-Arts, quelques-unes sont signées des plus grands noms. Gustave Doré, Foujita et Oscar Domínguez ont ainsi pu marquer de leur empreinte…
Fresques carabines : fin d'un art grivois à la française ?
Inconnues du public, les salles de garde de nos hôpitaux sont l’écrin des fresques carabines, tradition bicentenaire unique au monde. Leur avenir semble scellé : le gouvernement souhaite sonner le glas de cette pratique artistique, réduite à peau de chagrin depuis quelques années. L’association le Plaisir des Dieux se mobilise pour que soit préservé ce patrimoine .