Le Quotidien de l'Art

L'image du jour

Piste de déluge

Piste de déluge

« En 2100, il ne restera plus une seule île dans le golfe du Morbihan, explique le commissaire Emmanuel Daydé. Elles auront toutes été englouties. » Si l’urgence climatique a donné lieu à maintes interventions artistiques, celles qu’accueille le domaine de Kerguéhennec en ce printemps ont une filiation directe avec les légendes locales. On se souvient en effet de la ville d’Ys, submergée lorsque la fille du roi Gradlon donna les clés de la digue au diable : un petit tableau d’Évariste Luminais, plus connu pour ses obsessions mérovingiennes, résume un moment dramatique de l’action. Face au thème du déluge à venir, les deux autres intervenants sont contemporains, mais de racines méridionales – grecques et libanaises. Mâkhi Xenakis, qui conserve des souvenirs de sorties en Méditerranée pendant les tempêtes avec son père compositeur, fait perler des encres bleues sur du papier japonais et dirige leur écoulement : elles deviennent gouffres, vagues et rouleaux. Zad Moultaka, compositeur mais aussi plasticien qui a représenté le Liban à la Biennale de Venise 2017, a soumis aux intempéries d’immenses lés de papier, balafrés de peinture acrylique. Baignés, essorés, pliés, froissés, ils sont devenus, au gré du regardeur, des fonds marins, des ondes, des ressacs ou ces « marais énormes » chers à Rimbaud, « nasses où pourrit dans les joncs tout un Léviathan ». On s’y plongerait pour devenir le « fileur éternel des immobilités bleues »…

À lire aussi


Édition N°2857 / 25 juin 2024

5,6 millions €

Le montant de l’investissement pour réhabiliter le Domaine de Kerguéhennec

Par Françoise-Aline Blain


Laura Jones remporte l'Archibald Prize
Article abonné

Archéologie et dérèglement climatique : vers une société sans ruines ?
Article abonné

Article issu de l'édition N°2593