Il y a trois semaines, un jeune homme se hissait sur les toits du Panthéon pour mettre le drapeau français en berne. Il y est resté arrimé plusieurs longues minutes avant d’être envoyé en garde à vue. Quelques jours plus tard, deux jeunes militants jetaient de la peinture orange sur une sculpture de Charles Ray, installée devant la Bourse de Commerce - Pinault Collection à Paris, tandis qu’un autre s’attachait aux décors de La Flûte enchantée à l’Opéra Bastille. À chaque fois, les militants portent un t-shirt où l’on peut lire le message « We have X days left » et, face caméra, se collent à la vitre de protection des toiles ou à leur cadre.
Depuis plusieurs mois, militants et militantes de Just Stop Oil, Dernière Rénovation, ou encore Ultima Generazione multiplient les manifestations dans les institutions culturelles. Leur objectif : « choquer », explique un militant de Dernière Rénovation. « C’est assumé, on ne veut pas faire de pédagogie car aujourd’hui on ne peut plus se permettre d’être dans le consensuel, continue-t-il. On favorise donc des actions de perturbation non-violente qui sont soit symboliques, soit économiques. » Le discours, bien rodé, est similaire chez Just Stop Oil : « Nous voulons permettre l’avènement d’un avenir où la créativité humaine est encore possible, confient les militants. Il faut enfreindre les règles, défier, provoquer et choquer. Il n’y a pas d’autres moyens. »
L’urgence est palpable dans ces discours : il faut agir maintenant, la planète brûle, littéralement. Pendant ce temps, le monde de l’art s’enferme dans le silence. Les groupes militants ne circonscrivent pas leurs actions aux musées : certains ont bloqué le boulevard Haussmann à Paris, l’autoroute A6 ou les rues de Londres, d’autres ont interrompu le Tour de France. Mais les lieux culturels sont devenus le terrain régulier de leurs manifestations. Pourquoi ? « On utilise les œuvres pour questionner, toucher des sensibilités, détaille Sasha, militant de Dernière Rénovation. On voit bien à quel point c’est clivant : il y a des gens profondément offusqués par nos actions quand d’autres trouvent ça génial. Cette polarisation autour de nos agissements reflète celle de la société. » C’est ce qu’expliquent Anne et Juliette Bessette, respectivement sociologue et historienne de l’art, dans un article paru dans AOC. Elles citent des études récentes en psychologie environnementale qui « mettent en évidence une forme de dissonance cognitive entre la disponibilité de l’information scientifique relative à la crise climatique et le comportement des individus et les décisions des gouvernants ». C’est cette contradiction que les récentes actions de désobéissance civile dans les musées pointent du doigt.
Un difficile positionnement
La méthode…