« En 2016, quand le ministère de la Culture décida de classer la chaîne des terrils du bassin minier, c’était la première fois qu’on classait un tas de déchet ! » L’humour de Florence Hachez-Leroy, maîtresse de conférence à l’Université d’Artois, est le signe d’une victoire. L’usine des cafés Patin, l’ancienne chocolaterie Meunier, une bonneterie dans les Vosges... en 2021, une mesure sur dix de protection au titre des monuments historiques concernait un édifice industriel. Chaque année, la mission Bern inclut dans son « état des lieux national du patrimoine remarquable en péril » une proportion non négligeable de monuments industriels. Sucreries, domaines agricoles, hauts-fourneaux ou briqueteries représentent près de 20 % de la moisson 2022, contre 28 % des édifices emblématiques de la première édition, en 2018. « Depuis quelques années, je perçois un intérêt plus profond pour ce patrimoine, observe Philippe Roumilhac, délégué Hauts-de-France de la fondation du Patrimoine. Les propriétaires font plus attention, quand hier ils auraient laissé à l’abandon. Cela va avec l’éveil aux savoir-faire locaux. La fondation souhaite quant à elle diversifier les approches du patrimoine, et donc les publics. »
Ces résultats témoignent d'un chemin parcouru en un temps record. La formule « patrimoine industriel » a longtemps été perçue comme un oxymore. « Dans les années 1960 on parlait d’archéologie industrielle, explique Florence Hachez-Leroy. Jusqu’aux années 1980, l’hostilité est très forte de la part des architectes des bâtiments de France. L'expression ''patrimoine industriel'', qui témoigne de la conscience d'une valeur historique, n'apparaît qu'en 1979, avant qu’une sous-commission ne soit créée sous Jack Lang au sein de la direction des monuments historiques. C'est la période où on cherche des solutions à la désindustrialisation, où les écomusées se développent. » L’UNESCO se…