Un ancien président du Louvre mis en examen pour blanchiment et complicité d’escroquerie en bande organisée dans une affaire de trafic d'antiquités : l'annonce est un séisme dans le milieu feutré du patrimoine. Selon des informations révélées le 25 mai par le Canard enchaîné, Jean-Luc Martinez, ancien président-directeur du Louvre, ainsi que Vincent Rondot, directeur du département des antiquités égyptiennes du musée, et Olivier Perdu, égyptologue rattaché au Collège de France, ont été placés en garde à vue le 23 mai par l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC) à la demande du juge d'instruction Jean-Michel Gentil. Les trois hommes sont soupçonnés d'avoir participé à un trafic d'antiquités, comprenant cinq objets dont une stèle en granit rose marquée du sceau du pharaon Toutankhamon, acquis par le Louvre Abu Dhabi en 2016 pour 15,2 millions d'euros. Selon Le Monde, Vincent Rondot et Olivier Perdu sont sortis de garde à vue le 24 mai, tandis que Jean-Luc Martinez y est resté une journée de plus et a été mis en examen, restant sous contrôle judiciaire. Les faits qui leur sont reprochés : les trois hommes ont validé l'acquisition des objets dans trois commissions d'achat différentes, alors que leurs certificats de provenance seraient des faux, passés par les mains de Roben Dib, marchand de Hambourg, et le spécialiste en antiquités Christophe Kunicki. En 2019, Marc Gabolde, professeur à l'université de Montpellier et spécialiste de Toutankhamon, alertait le Louvre ainsi que l'agence France Muséums (dirigée alors par Anne Mény-Horn) sur la douteuse sortie d'Égypte de la stèle, qui serait passée par les mains d'un capitaine allemand de la marine marchande dans les années 1930 puis celles du marchand égyptien Habib Tawadros. Son signalement n'a pas reçu de réponse. Interrogé par Le Monde, l'égyptologue affirme que « les conservateurs et égyptologues sont victimes et non complices des trafiquants ». Or Jean-Luc Martinez connaît parfaitement les rouages du trafic d'antiquités : en 2015, François Hollande lui commandait un rapport, « Protéger le patrimoine en situation de conflit armé », et depuis 2021, il est ambassadeur chargé de la coopération internationale dans le domaine du patrimoine au sein de l'Alliance internationale pour la protection du patrimoine dans les zones de conflit (ALIPH).