Se dépayser chez soi : si l’idée fait florès depuis le premier confinement, la compagnie pluridisciplinaire KMK la déploie pourtant avec poésie depuis 2010 dans ses balades sonores. Equipé d’un lecteur MP3 et d’une carte poétique dépouillée de sa toponymie, on divague au gré des rues du Kremlin-Bicêtre ou de Châtillon, à l’écoute des paysages, des hommes et femmes du quartier, au son d’un conteur reprenant des morceaux de littérature choisis, ou au rythme d’un danseur qui impulsera le temps de la marche. Le projet Ailleurs à… est une aventure urbaine, une mise en scène de l’architecture oubliée. « Nous partons d’un lieu : un lieu qui nous parle, nous intrigue. Un lieu qu’on ne visite pas mais que l’on habite, où l’on travaille. Un lieu que l’on veut faire découvrir comme on découvre une ville à l’étranger quand tout paraît étrange, digne d’intérêt. Ces Promenades sont là pour regarder ce qu’on ne regarde plus dans notre quotidien », confie la directrice artistique de Ailleurs à… , Véronique Pény. Rien n’est laissé au hasard : danseurs, écrivains, photographes, comédiens, musiciens, metteurs en scène, diplômés d’architecture, ou graphistes conversent, collaborent et se confrontent pour donner naissance à une expérience multidimensionnelle où chaque détail est une création.
Après 27 promenades sur sept territoires dont les faubourgs de Nantes et Angers ou de la Seine et Marne, la compagnie franchit cette année un nouveau cap grâce au soutien exceptionnel du mécénat de la Caisse des Dépôts. Attachée à promouvoir la transmission et la beauté de l’architecture et du patrimoine comme bien commun, ce mécène ne pouvait passer à côté du projet. KMK a posé ses valises dans un autre lieu galvaudé, un territoire plus souvent cité dans les pages justice que culture de nos journaux : Fresnes. Une première promenade contée et musicale emmène d’une vieille ferme à un nouvel écoquartier, en passant par un sous-bois que nous présente son gardien. A la veille de l’été, une deuxième envolée poétique redonnera sa noblesse à la résidence de la Peupleraie par le truchement d’une classe de CM2. Ces longues barres d’immeuble conçues Après-Guerre par l’association locale des castors ont été construites par les habitants eux-mêmes, en échange de quoi ils devenaient propriétaires à moindre coût et dans une ambiance d’entre-aide hors du commun. Loin des commandes auxquelles la compagnie est habituée à répondre, le mécénat de la Caisse leur permet de s’ancrer dans le territoire pour y développer une collection de promenades comme autant d’expériences sensorielles. Pour la première fois, une troisième déambulation sera proposée à l’été sur le mode cinématographique. L’imaginaire du promeneur sera éveillé par l’écoute binaurale de scènes de films sur les lieux de la déambulation. La compagnie ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Les artistes planchent déjà sur la suite du projet s’étendant au-delà de Fresnes dont une promenade à déguster. Et si la ville se mangeait, quel aliment serait-elle ? Réponse en 2023.
Informations : https://www.cie-kmk.org/creations/ailleurs-a/