Le Palais de Tokyo, à Paris, doit accueillir, le vendredi 8 mars à 19 heures, un « Pecha Kucha » de la critique d'art organisé par l'AICA (association internationale des critiques d'art) dans le cadre de la « Journée internationale de la femme ». Dix critiques d'art [Marie-Cécile Burnichon, Anaïd Demir, Anne-Marie Duguet, Muriel Enjalran, Fabienne Fulchéri, Ann Hindry, Rebecca Lamarche-Vadel, Philippe Piguet, Emilie Renard et Anne Tronche] présenteront en 6'40 chacun le travail d'une artiste femme. Un jury désignera le vainqueur, l'artiste défendue bénéficiant d'une publication dans la revue Art Press et d'une exposition au Cabinet des dessins du musée d'art moderne de Saint-Etienne Métropole.
Mais, une lettre ouverte rendue publique hier et signée par de nombreux critiques d'art (tels Élisabeth Lebovici, Marie Muracciole, Marcella Lista, Jean-Pierre Criqui…) s'indigne de la tenue de ce « Pecha Kucha ». « Déjà le Palais de Tokyo s'est fait remarquer pour la sous-sous-sous-représentation des femmes dans ses expositions depuis sa réouverture. Or, le moins qu'on puisse dire, c'est que le Pecha Kucha est un dispositif expéditif : 6'40 par prestation. En japonais, d'où ce mot est tiré, cela veut dire "bruit dans la conversation", ce qui nous mène assez rapidement au cliché sexiste qui reproche aux femmes d'être des "parleuses" et leur coupe ainsi le sifflet. En plus, ça permet de sous-payer, ou de ne pas payer du tout les intervenantes consentantes - pour si peu de temps n'est-ce pas ! 6'40 par prestation, ça réduit "la" journée de "la" femme à une heure. Mais le plus dégueu n'est pas encore là : c'est le fait de ce jury qui va évaluer les présentations, et désigner la gagnante. En d'autres termes, la journée de la femme se transforme ici en un concours d'éloquence critique, redoublé d'une compétition où dix femmes sont opposées les unes aux autres. Il y a beaucoup de choses moches qu'on peut faire pendant "la" journée de "la" femme. Mais là, on atteint des sommets », peut-on lire dans ce courrier adressé à Raphaël Cuir, président de l'AICA - section France.