Peinture, dessin et collage se confondent dans le travail de l’artiste : l’œuvre de Thilleli Rahmoun est singulière. Elle nous plonge littéralement dans l’Ars memoriae. Ce procédé mnémotechnique antique, utilisé par les conteurs et griots pour mémoriser les histoires, est conçu sur le souvenir de lieux déjà bien connus, auxquels on associe par divers moyens les éléments que l'on souhaite mémoriser afin d’ériger un palais des mémoires. L’artiste bâtit le sien à travers l’élaboration d’une esthétique du fragment par l’intermédiaire de différents procédés : la répétition, l’idée de parcours, une temporalité hybride, la notion d’ambivalence ou encore les jeux de transparences.
Présences étranges d’éléments urbains, intrusions insolites d’animaux et autres éléments énigmatiques se superposent et se font écho dans la démarche de l’artiste. L’aspect sériel et la répétition de motifs : usines, oiseaux, palmier, piscines etc. sont des présences indicielles, qui fonctionnent à la fois comme un moyen de mémorisation et comme un souvenir surgissant à l’esprit. Thilleli Rahmoun s’attarde à planter le décor, par strates comme l’indique le travail de composition et de matière. Prémisse de cet art oratoire, la peinture, le dessin et le collage jouent le rôle de la narration. Ils sont le verbe. En intervenant, l’artiste efface, souligne et/ou fait le lien entre les lieux et les indices. L’artiste guide ainsi le spectateur. Elle met en place une topographie de souvenirs, où se chevauchent des bribes de son passé, des souvenirs appartenant à d’autres et des images fantasmées. En filigrane, on devine une notion de parcours. Tout d’abord par la…