Christie’s disperse le 7 octobre à Paris une soixantaine de meubles de Pierre Chareau ayant appartenu à Jean et Annie Dalsace. Un événement : jamais une collection intacte d’un même créateur, conservée dans la même famille depuis cent ans, n’est passée sous le marteau. La valeur de l’ensemble, estimé 2,5-3,5 millions d’euros, tient bien sûr à l’aura de l’architecte-meublier, décédé en 1950, mais plus encore à celle du bâtiment qui l'a abrité : la Maison de verre, ce sommet de l’architecture moderniste achevé par Chareau en 1932 pour le couple Dalsace. Une audace absolue, avec sa façade entièrement pavée de briques de verre translucides produites par Saint-Gobain. Classée en 1981, la maison est vendue par la fille des Dalsace, Aline Vellay et son mari Pierre en 2005 au collectionneur américain Bob Rubin, qui n’en achètera que les murs. Car trois meubles seulement, notamment un porte-manteau aux cintres en forme de moustache et un tabouret de consultation, ont été spécifiquement créés pour la maison. Le reste provient des différentes résidences de la famille Dalsace. Une partie des meubles sera alors déménagée dans l’appartement d’Aline Vellay, surplombant la Maison de verre, l’autre sera conservée par Bob Rubin selon un accord de dépôt. C’est la mort dans l’âme que les enfants d’Aline Vellay, décédée en 2018, s’apprêtent à en céder les dernières reliques pour régler les droits de succession. Pour aguicher les collectionneurs américains qui depuis les années 1980 se passionnent pour la fluide géométrie de Chareau, Christie’s prévoit d’exposer quelques lots à New York avant le jour J, « si la situation sanitaire le permet », précise Cécile Verdier, présidente de Christie’s France.