Jusqu’ici, aux États-Unis, jamais le monde de l'art n'avait posé aussi ouvertement le problème de l'exclusion des artistes noirs de ses institutions. Les statistiques sont éloquentes : en 2019, une étude menée par le Williams College montrait que les œuvres d'artistes africains-américains ne représentaient que 1,2 % des œuvres conservées dans les musées américains, chiffre qui confirmait les soupçons de nombreux connaisseurs mais laissait le grand public sous le choc de l'ampleur de la disparité raciale. Dans l’ensemble des collections des musées, 85 % des artistes sont blancs et 87 % sont des hommes. Un an plus tôt, une enquête conjointe menée par Artnet News et In Other Words constatait que « depuis 2008, dans 30 grands musées américains, 2,37 % seulement des acquisitions et des dons et 7,6 % de toutes les expositions ont concerné des œuvres d'artistes noirs ».
Nous sommes en plein dans « ce moment où le monde de l'art reconnaît qu'il est vraiment important de se diversifier, déclare Patricia Banks, professeure de sociologie et autrice de Diversity and Philanthropy at African American Museums. C'est une tendance que nous constatons depuis quelques années, mais avec les manifestations (du mouvement Black Lives Matter, ndlr) à l'été 2020, la pression pour atteindre cet objectif est d’autant plus forte ».
Beaucoup de musées ont pensé qu'une partie de la solution consistait à diversifier leur conseil d'administration. Selon un rapport de 2017 de l'American Alliance of Museums, près de la moitié des institutions n'ont aucun membre racisé dans cette instance qui, pourtant, dispose d’un grand pouvoir de décision. « Historiquement, les institutions culturelles attirent un certain type de personne, explique Patricia Banks, et on observe dans cette participation à la vie des musées un phénomène de reproduction familiale et sociale, dans lequel les réseaux jouent un grand rôle. » Et si vous êtes la seule personne noire dans un conseil…