Le positionnement a été un argument central pour Laetitia Gorsy qui a ouvert She Bam ! fin 2018 à Leipzig. « C'est une foire engagée, qui défend ses idées, tout comme ma galerie qui a un format très spécial, puisque je ne représente que des femmes, tout en ayant un parti curatorial très précis. » Pour sa toute première foire, elle illustre son propos autour d'œuvres d'Anna Nero, Winnie Seifert ou Dorothée Louise Recker.
Liberté de choix
Pour Éric Landau, qui a fondé la galerie W à Montmartre en 1997, il s'agit d'une première tout court. « J’ai décidé de participer à Galeristes après avoir renoncé pendant plusieurs années aux salons parisiens par manque de liberté. Je n’arrivais pas à m’épanouir, à faire de vraies expositions, à présenter le cœur de la galerie, son âme, « le sel de notre travail ». J’ai trouvé, dans ce concept du rapport entre l’anthologie de l’art français et le volet général, un équilibre. J’ai pu choisir sans qu’un comité ou autre révise les choix d’artistes ou leurs œuvres. » À découvrir avec Raymond Hains, Davis Vanzel, Catherine Ikam, Boris Garanger, Toma-L. Jérôme Arcay tente l'aventure après avoir été déçu de ses trois participations au MAD et espère trouver un public plus captif pour les sérigraphies de Gérard Schlosser en particulier. Eva Taieb, elle, connaissait très bien le salon qu'elle arpentait en tant que collectionneuse, et lorsqu'elle a ouvert The Fibery Gallery il y a un an et demi, il était évident de passer de l'autre côté du « miroir », ce qui est donc chose faite cette année, avec des œuvres de Clarence Guéna. Pour Cyrille Catherin de la galerie Red Zone de Francfort, spécialisée en art asiatique, il s'agit d'un choix stratégique prolongeant la dynamique lancée en septembre dernier avec une première prise de contact avec des collectionneurs français à Art Paris. « Il me paraissait judicieux de faire un pont avec une autre foire de qualité à Paris, mais d’un format et d’une approche différents pour présenter des œuvres d’autres artistes. » Citons Qiu Jie, qui vient d'intégrer les collections du musée Cernuschi, dont un grand dessin à la mine de plomb côtoie des œuvres graphiques de Yu Jen-Chih, Ye Hongxing ou Da Zi Bao. L'Asie est également à l'honneur chez Pierre-Yves Caër Gallery, avec tout particulièrement Akira Kugimachi, Aya Kawato, Maiko Kobayashi, Jacques Bosser ou Akihito Takuma.
Sauver la mise
Pour beaucoup, l'opportunité de la période où se multiplient en cascade les annulations d'événements a libéré un créneau pour intégrer ce salon déjà bien placé dans leur viseur. « L'annulation de la FIAC a présidé notre décision de postuler à Galeristes, dont le propos m'a toujours intéressé », reconnaît Michèle Didier, qui est plus habituée aux foires internationales. Elle réserve son programme prévu à la FIAC pour 2021, et offre ici un panel représentatif de sa ligne conceptuelle, avec comme pilier On Kawara, entouré de proverbes d'Annette Messager et d'une grille de Saâdane Afif, annonçant la publication en février prochain de tout ce travail autour de la Fontaine de Marcel Duchamp depuis 2008. Adeline Jeudy de la galerie L.J. était jusqu'à présent mobilisée par Asia Now, « que nous n'avions pas prévu de refaire cette année par manque de propositions adéquates. J'avais imaginé qu'il n'y aurait aucune foire en octobre, donc ne m'étais pas vraiment posé la question. Et puis j'étais tellement heureuse de retrouver cette effervescence à DDessin, que j'ai voulu rebondir en octobre sur Galeristes que nous avons donc contacté très en retard ! Par chance, il leur restait deux emplacements et ils ont accepté notre proposition autour de trois artistes : Quentin Garel, dont la carrière est déjà bien installée, Étienne Pottier, encore émergent, et Ben Tolman dont l'exposition du printemps dernier a été raccourcie à cause du confinement. Je pense qu'à eux trois ils résument bien l'intérêt de la galerie pour les artistes graphiques, figuratifs, avec une attention de plus en plus forte pour le volume. »
De l'Afrique à l'art moderne
L'éclectisme sera le mot d'ordre de Valérie Delaunay, de Corine Borgnet à Julie Legrand en passant par Florence Obrecht ou Timothée Schelstraete. Tout aussi dynamique sera le stand d'Alexandre Lazarew avec trois artistes reflétant la personnalité plurielle de la galerie : une installation en laine très gourmande et sensuelle de Claude Como, une confrontation des paysages sur carton et sur papier d'Olivier Catté (où se répondent un trait soulignant une architecture orthonormée et une ligne à la fluidité inspirée de la tradition chinoise). « Étant donné que la foire se revendique locale et française, nous louons un espace supplémentaire rue du Perche pour déployer les univers de ces artistes. Nous espérons donc tirer notre épingle du jeu », confie la directrice, Laura de Pontcharra. Clémence Houdart, dont la galerie 31 Project promeut des scènes africaines, se recentre également sur la scène locale. « Nous voulions faire 1:54 à Londres, mais nous travaillerons cette belle et riche place de marché qu'est Paris autour de trois artistes femmes : Georgina Maxim (qui a représenté le Zimbabwe à la Biennale de Venise en 2019), Temitayo Ogunbiyi et Hélène Jayet. » L'art moderne n'est pas en reste et s'affiche comme un contrepoint ou une opportunité pour asseoir une collection avec un volet historique, ce qu'ambitionne Jean-François Cazeau avec un beau pastel d'André Masson, un bas-relief de Germaine Richier ou un dessin de Giacometti (on flirte ici avec les 150 000 euros) ou avec T&L, qui propose de redécouvrir le surréaliste anglais Stanley William Hayter.