Dans l’œil du cyclone, l’École française d’Extrême-Orient qui fouille actuellement au Laos, au Cambodge, en Indonésie et en Corée du Nord, a été touchée avant tout le monde par la pandémie mondiale. « La gestion de ces chantiers a été délicate en début d’année car nous ne savions pas que la pandémie serait si importante. Les équipes étaient sur des sites perdus et idylliques, loin des agitations du monde, nous confie Christophe Pottier, directeur des études de l’École française d’Extrême-Orient. Cela a été difficile de leur faire comprendre que le principe de précaution prévalait. À partir de la fin février, plusieurs partenaires dont l’Inrap ou d’autres, anglo-saxons et australiens, ont préféré annuler et reporter les campagnes. » Les équipes et étudiants ont été rapatriés, à l’exception des personnels fixes qui tentent de reprendre l’activité actuellement. « Nous sommes soumis en même temps aux réglementations françaises et locales, qui parfois divergent dans leur progression. Le centre du Vietnam a rouvert mais sans public, quand celui de Corée est toujours confiné. Les chantiers eux ne reprendront au mieux qu’à l’hiver prochain quand les conditions de mobilité des personnes et météorologiques seront réunies. Ce n’est pas très grave, car à l’exception de certains laboratoires de datation aux États-Unis qui n’ont pas encore rouvert, les travaux de fonds et d’analyse ont pris le pas. » Comme en France, seuls les personnels contractuels (archéologues, topographes, dessinateurs, géomorphologues) sont réellement menacés par cette interruption. Malgré la sécurité que représentent les financements pluriannuels de ses projets à moyen terme, Christophe Pottier tire la sonnette d’alarme : « Le développement de l’archéologie dépend du développement touristique. Avant l’essor touristique, il y a dix ans, seule l’aide internationale permettait de conduire des chantiers en Asie. Avec cette nouvelle manne, les États ont compris le pouvoir d’attractivité de l’archéologie et la financent. La fréquentation quasi nulle de sites majeurs comme Angkor va avoir des conséquences sur notre activité. Il est urgent de dissocier le tourisme du financement du patrimoine. »
En France, les chantiers de fouille en cours ont tous été suspendus abruptement au lendemain de l’adresse d’Emmanuel Macron, le 17 mars. Certains avaient même déjà pris les devants : « Dès le 16 mars, nous avons décidé d’interrompre et de sécuriser les 130 chantiers en cours », précise le directeur général de l’Inrap, Daniel Guérin. En effet, les mesures de confinement ont pu faire planer le risque de pillages ou de destructions de sites archéologiques. Si le trafic d'antiquités n'a,…