Le Quotidien de l'Art

Comment le marché de l'art envisage l'avenir

Comment le marché de l'art envisage l'avenir
Vue du stand de la galerie A Gentil Carioca, Art Basel 2019.
© Art Basel.

Partagés entre la crainte du lendemain et la nécessité de se réinventer, les acteurs du marché tentent de dessiner leur « nouvelle normalité » en tirant profit des leçons du passé.

Chamboulé par le coronavirus, le monde de l’art se plaît à rêver de la page blanche et du « grand soir », avec ses tables rases et ses nouvelles solidarités qui, sur les décombres du Covid-19, feraient surgir un monde nouveau. Moins d’égoïsme et plus d’altruisme, moins de « biennalisation », de « festivalisation » et de « financiarisation », moins de pratiques écocides et plus d’attention à l’empreinte carbone... L’heure est à la contrition généralisée. « On était dans une course à l’échalote, un tourbillon perpétuel, en nous calant sur ce que faisait le voisin, confie le galeriste Kamel Mennour. On ne peut pas redémarrer comme avant. » 

Dans une tribune publiée le 7 avril par le site ARTnews, Marc Glimcher, patron de la puissante Pace Gallery, assurait la main sur le cœur que le « rétablissement (du monde), aussi long et complexe soit-il, passera par notre capacité à rejeter ce qui pollue, dégrade et érode notre monde créatif et à embrasser et protéger ce qui est réel, durable, et inspirant pour nos vies et pour l’art ». Et d’aspirer à la sobriété heureuse... en licenciant, deux jours plus tard, 25 collaborateurs, dont l’emploi aurait pourtant pu être sauvé par les quelques ventes déjà effectuées de la mirifique collection Don Marron, partagée entre Pace, Gagosian et Acquavella. Le « monde d’après » n’est pas pour demain...

Des inégalités creusées

Bien malin – ou impudent – qui peut prédire comment l'histoire se terminera, et de quel monde elle accouchera. Au mieux peut-on s’autoriser des projections à l’aune du passé. La crise de 1990 a mis le marché à genoux pendant dix ans. Marion Papillon, présidente du Comité professionnel des galeries d’art (CPGA), le rappelle : 46 % des galeries françaises ont alors fermé. Plus de 30 % ont disparu après celle de 2008. L’économiste Clare Walsh souligne pour sa part qu’après la crise des subprimes, les ventes aux enchères avaient chuté de 40 % en un an. Pis, les prix de l’art contemporain se sont effondrés de 60 % entre 2007 et 2009. En 30 ans, toutefois, le contexte a évolué. Dans la décennie 1980, les Japonais étaient les plus gros acheteurs, emportant en mai 1990 la moitié des lots du soir de Sotheby’s et Christie’s. Aujourd’hui, le marché est plus global. Plus connecté aussi. « La crise survient à un moment où le digital a fait un saut quantique, en nous donnant des outils que nous n’avions pas par le passé », confie Iwan Wirth, co-fondateur de la puissante galerie Hauser & Wirth. 

Kamel…

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Article issu de l'édition N°1949