La bonne humeur palpable sous la coupole du Grand Palais au matin de l’ouverture de la FIAC s’est confirmée à l’heure de la clôture des comptes du jour. Paris, cette semaine, est une ville ouverte, au meilleur sens du terme. Ouverte aux galeries de Côte d’Ivoire ou d’Iran, aux collectionneurs du monde, d’Asie notamment. Ouverte aux audaces des galeries, les mégas et les autres, qui ont osé sortir et montrer des œuvres chères, très chères, mais aussi proposer des productions pointues, à l’attention d’un public venu faire son shopping, certes, mais un shopping avec des bulles d’intelligence autant que de champagne.
Une autre bulle, hélas, perdure à Paris. L’entre-soi des collectionneurs français s’expose tristement. Dans une enquête signée par le site documentations.art (et publiée sur le blog de Mediapart), l’Adiaf apparait comme un club hexagonal nombriliste. Le récit des visites d’ateliers où s’exprimerait, de la part de certains fossiles, un paternalisme et un sexisme hors d’âge, voire un racisme rampant, est consternant. Mais c’est oublier que d’autres membres, les plus jeunes notamment, ont poussé à l’attribution du prix Marcel Duchamp 2019 au talentueux Éric Baudelaire, ou en 2018 au non moins doué Clément Cogitore. Une fenêtre ouverte dans une maison aux volets fermés ?
La tentation du microcosme est d’autant plus ridicule qu’elle coexiste, ces derniers temps, en France comme ailleurs, avec une exigence d’éthique à laquelle aucun acteur du monde de l’art ne peut échapper. La philosophe Carole Talon-Hugon et la sociologue Violaine Roussel, dans un brillant entretien récemment publié par Le Monde, décortiquaient le ressort d’une question moins simple qu’elle en a l’air : « L’art doit-il être moral ? ». Sans entrer dans la subtilité de leurs raisonnements croisés, on pourrait ajouter que le milieu de l’art parisien gagnerait à se caler sur les valeurs qu’il prône – diversité et ouverture – et sans lesquelles le cru 2019 de la FIAC n’aurait pas été aussi bon.