Avec son beau visage aux sourcils broussailleux, Roger Taillibert, disparu le 3 octobre dernier à l’âge de 93 ans, avait quelque chose d’un empereur romain. Il est vrai qu’il avait su séduire les arènes, et d’abord celle du Parc des Princes, édifié par ses soins en 1972 et parachevé des décennies plus tard. Il avait encore signé à Montréal l’écrin des Jeux Olympiques de 1976, bâtiment iconique ellipsoïdal au toit rétractable, flanqué d’une tour inclinée impressionnante. Poète des voiles de béton, il n’eut de cesse d’œuvrer dans le domaine des équipements sportifs, sa première réalisation étant la piscine de Deauville, que l’on continue d’admirer aujourd’hui. Élu en 1983 membre de l’Académie des Beaux-Arts, vénérable institution qu’il présida (ainsi que l’Institut), il portait fort bien l’habit vert. Néanmoins, démuni de commandes sur le sol français et forcé de déporter son champ d’activité vers les pays émergents du golfe Persique, où il signa en autres le Khalifa Stadium du Quatar, il en avait conçu une certaine amertume. Homme au verbe tranchant, il ne manquait pas de le faire savoir. À sa manière, il incarnait merveilleusement l’architecte démiurge, solide et audacieux. Taillibert ou l’homme de fer… en béton.