Entre deux trains et alors qu'elle prépare plusieurs expositions pour le Centre Pompidou-Metz qu'elle quittera fin août (Susanna Fritscher et « Le ciel comme atelier », autour d'Yves Klein et de ses contemporains) et à Poitiers (Kimsooja), Emma Lavigne anticipe son arrivée, début septembre, à la tête du Palais de Tokyo, « à rebours d'une position d'autorité ». « Je crois beaucoup au collectif, une notion que j'ai beaucoup développée à Metz, nous confie-t-elle. Je veux prendre le temps de la réflexion avec l'équipe de curateurs du Palais de Tokyo, peut-être organiser des workshops. C'est une équipe forte, soudée, qui expérimente. J'ai besoin de me nourrir de leur expérience, de leurs rêves, de leurs envies. » À quelques semaines du début de la Biennale de Lyon (dont elle a été commissaire générale en 2017), cette année confiée aux curateurs et curatrices de l'institution parisienne et de l'exposition sur « une » scène française, qui ouvrira en octobre, Emma Lavigne doit à la fois rassurer une équipe sans chef.fe depuis huit mois et ne pas brusquer ce collectif qui a dû faire avancer les projets dans une autonomie forcée. En ce qui concerne notamment l'exposition de rentrée, la prochaine présidente insiste sur « l'importance de la manifestation pour affirmer le Palais de Tokyo comme lieu de grande visibilité pour les artistes français, dont, pour beaucoup, [elle suit] le travail ». Elle ajoute : « C'est une étape importante, qui s'inscrit dans une histoire, après "Dynasty" en 2010, comme un rendez-vous pour un panorama ouvert qui assume sa subjectivité ». Une notion importante pour Emma Lavigne : « Je me méfie du plus petit dénominateur commun. » S'il est trop tôt pour qu'elle nous indique des éléments concrets de programmation, la future présidente annonce qu'elle a « construit un programme comme une plateforme d'échanges », souhaitant non seulement entretenir une « réflexion collective permanente » avec les curateurs.trices du Palais de Tokyo, mais aussi inviter « des artistes associé.e.s, des philosophes, des personnalités de champs divers ». Autre axe de travail d'Emma Lavigne : « La question du rythme est complexe. J'aimerais que le Palais reste symboliquement ouvert entre les expositions, en échangeant avec le Grand Paris et ses centres d'art, vers un public élargi. Je voudrais créer un vrai écosystème entre centres d'art, quelle que soit leur taille, comme nous l'avons fait avec Grand Est et le Centre Pompidou-Metz », affirme-t-elle. Enfin, autre angle de réflexion : « L'architecture extraordinaire du Palais de Tokyo. J'aimerais réfléchir à la plasticité de l'espace, exploiter son potentiel sémantique, souligne Emma Lavigne, proposer des expériences renouvelées à chaque fois. Mais aussi donner plus de repères, ne pas figer les usages, imaginer des fonctions nomades, travailler la circulation, la bifurcation, penser la sensation de perte et de surprise, démultiplier les perceptions. » Un projet qui contient peut-être plus qu'une révolution de palais.